vendredi, octobre 28, 2011

Un Président qui soliloque, une chancelière qui débat…

Nicolas Sarkozy a donc parlé, hier soir, pour la première fois depuis longtemps de la crise. Il l'a fait avec habileté et talent, même si ses attaques contre les socialistes, la retraite à soixante ans, les 35 heures paraissent bien usées et à coté de la plaque. Mais qu'il était seul! La presse internationale (et française) souligne à l'envi son second rôle en Europe et la prééminence d'Angela Merkel en général attribuée au poids économique de l'Allemagne. A entendre Nicolas Sarkozy soliloquant devant des journalistes complaisants, je me demande si sa faiblesse (et la force d'Angela Merkel) ne vient pas d'un déficit de démocratie. Il n'y a pas eu de débat en France sur la question européenne, sur le traitement de la dette, sur la Grèce. Les socialistes occupés à leurs primaires ont à peine abordé le sujet, quant à la droite, elle n'a pas eu son mot à dire. A l'inverse, les Allemands en ont longuement parlé, leur Parlement en a débattu, il a voté, donnant à Angela Merkel une légitimité qui a manqué à Nicolas Sarkozy. C'était toute l'Allemagne qui parlait avec elle, qui lui avait donné un mandat. Qui donc parlait avec Nicolas Sarkozy? Certainement pas la France, indifférente et tenue à l'écart, seulement quelques hauts fonctionnaires au service d'un Président contesté de toutes parts que l'on pouvait de plus soupçonner d'être au service exclusif de banques directement menacées par un défaut de la Grèce. Or, dans des négociations européennes, surtout des négociations entre chefs d'Etat la légitimité populaire compte. Celui qui se sait soutenu par son opinion, et qui peut avancer des preuves tangibles de ce soutien (comme un vote au Parlement) a un avantage décisif sur ceux dont la position peut à tout moment être contestée. Faire reculer Angela Merkel, c'était faire reculer l'Allemagne. Faire reculer Nicolas Sarkozy, c'était toucher un Président à l'avenir compromis. Ce n'est pas la même chose.

jeudi, octobre 27, 2011

Hollande : le risque Obama

François Hollande n'est pas mou, il est, comme le dit ce soir Le Monde, adepte du compromis, ce qui est tout autre chose et l'oppose, pour le meilleur à Nicolas Sarkozy, adepte, lui du conflit et des clivages. Cela ne l'empêche certainement pas de prendre des décisions ni de faire preuve d'autorité et il devrait dans les semaines qui viennent s'exercer à corriger l'image qu'ont pu donner de lui ses adversaires aux primaires socialistes et, d'abord, Martine Aubry qui a perdu parce que, probablement, trop agressive et clivante. Averti et intelligent il saura vite trouver les mots et les manières pour afficher cette autorité, d'abord au dépens des écologistes et des socialistes qui manqueraient d'enthousiasme. Il a, semble-t-il, déjà commencé en faisant savoir aux écologistes qu'un rapport de force se construisait plus sur des résultats électoraux que sur des ambitions. Il aura sans doute, dans les semaines qui viennent, l'occasion de le faire avec ceux qui au PS seraient tentés de trainer les pieds. Ces marques d'autorité lui permettront, avec un peu de chance, de gagner l'élection tant Nicolas Sarkozy parait démonétisé (et ce n'est pas le dernier accord européen qui l'a vu passer sous les fourches caudines d'Angela Merkel qui changera l'opinion), mais c'est après que ce goût du compromis pourrait lui jouer un mauvais tour. Il se pourrait bien qu'à trop vouloir rechercher le consensus il ne tombe comme Obama sur un os, je veux dire sur une opposition qui tourne cette volonté de compromis à son avantage. Il faut savoir marquer son autorité sur ses proches et ses alliés mais aussi sur ses adversaires, c'est ce que de Gaulle et Mitterrand avaient su su, chacun en leur temps, faire. C'est ce que Hollande devra réussir s'il veut, au delà de la conquête de l'Elysée, réussir sa présidence.

mardi, octobre 25, 2011

La gauche se rassemble, la droite se divise

A quelques jours d'intervalle, nous aurons eu deux séquences qui illustrent les tendances de fonds :
- l'image d'un parti socialiste conquérant réuni, toutes divergences oubliées, autour de son candidat qu'un vote populaire venait de légitimer,
- l'image d'une droite désemparée qu'illustrent les brouilles de plus en plus venimeuses sur fonds d'inquiétude sur les résultats des prochaines législatives et de concurrence pour la candidature en 2017 entre Fillon et Copé, avec pour terrain de bataille une circonscription solidement établie à droite à Paris. Fillon craignant de perdre l'élection dans la Sarthe se reporte vers une circonscription que vise Rachida Dati.

Celle-ci bien loin de se laisser faire ou de tenter de négocier son éloignement attaque et frappe fort. Ses accusations sont de celles qu'on ne pardonne que difficilement.

Il y a le combat des chefs, de Fillon et Copé mais on sent, derrière, la blessure d'une femme qui n'oublie pas qu'elle a été l'icone de la diversité, et qu'on lui a demandé de mener une réforme de la justice allant à l'encontre des attentes des magistrats, dont elle fut.

La violence de la réaction de Rachida Dati est à l'image de la blessure que fut la sienne lorsque le Président l'a rejetée. Il paie avec elle, comme avec d'autres, sa brutalité.


<h2> Radio France Politique Rachida Dati</h2> <p> </p>


samedi, octobre 22, 2011

DSK : nous l'avons échappé belle…

Les derniers développements de l'affaire lilloise coupent le souffle. Voilà un candidat à la présidentielle qui, alors même que l'on ne parlait que de ses chances de succès, s'embarquait dans des parties fines avec des policiers et des personnages douteux! Imaginons un instant qu'il ait été élu : nous aurions eu un Président que n'importe quel aigrefin au service d'une puissance étrangère, d'un quelconque lobby aurait pu faire chanter. Et s'il n'y avait eu les primaires socialistes, nous aurions aujourd'hui un candidat empêtré dans des affaires impossibles…

A ce point d'irresponsabilité, on ne peut que remercier Nafitassou Dialo et le procureur new-yorkais de nous en avoir débarrassé.

jeudi, octobre 20, 2011

Haines de famille…

Mediapart publie un très éclairant récapitulatif d'affaires récentes où l'on voit des personnalités proches du pouvoir placer leur argent dans des paradis fiscaux (Amis du président, ils montent au paradis fiscal). Il y a là Joëlle Ceccaldi-Reynaud (compte au Luxembourg nourri par ce qui est probablement l'argent de la corruption), Liliane Bettencourt (comptes en Suisse et aux Seychelles), les frères Wildenstein (compte aux Iles Caïman, Guernesey nourris par un détournement de succession), Bernard Tapie (Malte, Belgique), Thierry Gaubert (Bahamas, Liban), Ziad Takeddine (Luxembourg, Panama).

Or, ce qui frappe au delà de la proximité de tous ces délinquants fiscaux et de l'Elysée, c'est la source des révélations qui nous font connaître ce qui aurait dû rester cacher : le père de Joelle Ceccaldi-Reynaud, la fille de Liliane Bettencourt, la belle-mère des Wildenstein, les épouses de Gaubert, Takiedine… Si toutes ces affaires font demain tomber Nicolas Sarkozy, on pourra dire qu'il aura été victime des haines familiales autant que de ses propres faiblesses. Nous sommes entrés dans un monde dans lequel plus aucun secret ne tient, plus même celui des familles…

mercredi, octobre 19, 2011

Ministère de l'intérieur : l'autre échec de Nicolas Sarkozy

Nicolas Sarkozy s'est tant associé au Ministère de l'Intérieur, qu'il est difficile de ne pas le rendre comptable de tout ce qui s'y passe. On sait que sa politique de sécurité est très contestée pour ne pas avoir donné, et tant s'en faut, les résultats promis. Mais voilà que la police donne des signes très inquiétants de corruption chez ses plus hauts fonctionnaires. Il y a l'affaire Neyret où l'on découvre qu'un haut fonctionnaire de police, une vedette, le numéro 2 de la PJ de Lyon, pouvait se promener sans vergogne dans des voitures de luxe prêtées par des escrocs notoires, que plusieurs de ses collaborateurs s'adonnaient au trafic de drogue avec leurs indicateurs (car comment appeler autrement cette étrange pratique qui consiste à donner de la drogue à des indicateurs contre des renseignements?), que le chef de la PJ de Grenoble est mis en examen pour des faits similaires, qu'un autre fonctionnaire de la police, à Lille, cette fois-ci, pouvait avec, semble-t-il, l'aide de quelques collègues, policiers eux aussi, servir d'intermédiaires entre des proxénètes et des organisateurs de partie fine. Pour couronner le tout, on voit mis en examen le patron de la DCRI, la Direction Centrale du Renseignement Intérieur, pour avoir délibérément enfreint la loi dans l'affaire des fadettes et le directeur de la police nationale directement impliqué par celui-ci. Lille, Grenoble, Paris, Lyon, cela fait beaucoup, tant qu'on ne peut plus parler de brebis égarées. Et cela suggère, au minimum, un défaut de gouvernance, un manque de contrôle, une perte de repères que l'on ne peut qu'attribuer au principal responsable de l'administration, son ministre, surtout si celui-ci a longtemps conservé ce portefeuille et a conservé un oeil sur le ministère après l'avoir quitté.

On dira que Nicolas Sarkozy n'est pour rien dans ce qui s'est passé (sauf, peut-être, mais l'enquête le dira un jour, dans l'affaire des fadettes), disons qu'il est aussi innocent que le chef d'entreprise qui laisse se développer des pratiques de management contestables sans réagir. 

Il y a des primaires plus féroces que les notres

Nous regrettions la tension des derniers jours entre François Hollande et Martine Aubry, mais comme on était loin de ce qui se passe aux Etats-Unis chez les Républicains où l'on vit Mitt Romney et Rick Perry en venir presque aux mains après que le second ait accusé le premier d'avoir employé du personnel sans papier (c'est en fait, semble-t-il, un entreprise chargée de l'entretien de sa pelouse qui employait des sans-papiers).


On dit que le candidat le plus agressif est celui qui perd dans ce genre de joute. Ce serait alors Rick Perry, mais le geste de Mitt Romney, main sur l'épaule de son adversaire n'était pas franchement amical. Enfin, penser que l'un ou l'autre risque demain de battre Barack Obama inquiète franchement.

mardi, octobre 18, 2011

Quand les médias nourrissent le populisme

Prendre le taxi à Paris est devenu pénible. Non, comme autrefois, à cause des chauffeurs qui ne cessaient de protester contre tout et rien, ils se sont calmés, mais à cause des radios que beaucoup écoutent. Je ne parle pas des soirées de discussions sans fin sur le football mais de ces émissions de radio ouverte que l’on peut entendre sur RMC, RTL et bien d’autres chaînes.

Ces émissions fonctionnent toujours sur le même principe : donner aux auditeurs la possibilité de s’exprimer pendant quelques dizaines de secondes. Cela ne coûte pas cher (pas de droit Sacem, pas de programmateur) et cela a semble-t-il un certain succès.

Les faits divers, l’actualité politique nourrissent ces temps d’antenne qui prétendent, à l’instar de Le Pen, mais ce n’est pas un hasard, permettre aux Français de dire tout haut ce qu’ils pensent (ou plutôt penseraient) tout bas. En fait, les auditeurs qui s’expriment le font dans le cadre très particulier de l’anonymat, on ne donne à l’antenne que leur prénom, ce qui leur permet de s’exprimer sans aucune autocensure ni réserve : l'anonyme peut dire n’importe quoi à l’antenne puisqu'il ne risque pas d’être rappelé à l'ordre par le souci de la bonne opinion que les autres ont de soi. Ce n’importe quoi serait insignifiant s’il n’était aussitôt repris par l’animateur et transformé par celui-ci en une parole qui compte.

La spontanéité est valorisée, souhaitée, demandée, exigée même parfois par les animateurs. Les auditeurs s’expriment donc au nom de l’émotion ressentie à l’annonce d’une catastrophe, d’un crime particulièrement horrible, d'une décision politique susceptible de les affecter (augmentation du prix du tabac…), ce qu'ils le font le plus souvent avec virulence. Ces émissions ne nous donnent à voir que des émotions brutes. Et, bien loin de tenir les réactions spontanée forcément excessives que l’émotion suscite pour des propos que le bon sens corrigerait aussitôt dans la vie ordinaire, l’animateur leur donne une stature, un statut, une importance politique, idéologique qu’elles n’ont évidemment pas : c’est, nous répète-t-il en permanence, le peuple qui parle. Le peuple? On devrait dire la foule, celle qui se laisse entraîner dans les pires dérapages. La foule virtuelle que rassemble ces émissions ressemble à celles qu’analysait Le Bon, capables de lyncher un innocent, d’appeler au meurtre ou à la guerre. Que les propos qu’on entend en permanence dans ces émissions miment ceux que tiennent les populistes, notamment le Front National ne gêne pas leurs animateurs, bien au contraire. Bien loin de s'interroger sur cette troublante proximité, ils s'en félicitent puisqu'elle leur donne le sentiment d’être en phase avec cette France populaire dont on nous répète sans cesse qu'elle vote de plus en plus pour l’extrême-droite.

Pour se défendre des accusations, les médias qui se livrent à ce petit jeu assurent filtrer les réactions des auditeurs. En fait, ils les éditent, ils effectuent une sélection et organisent une sorte de débat déséquilibré : deux ou trois interventions transgressives contre une qui ramène au bon sens. La transgression fait le succès de ces émissions qui n'ont qu'un mot à la bouche : lutter contre la bienséance, contre le politiquement correct, contre la langue de bois, contre tout ce qui vise à contenir l'émotion. Pour que l’émission soit bonne, pour qu’elle suscite des réactions et donne à ses auditeurs le sentiment d’entendre une autre voix, une voix qui leur soit proche, il leur faut casser ces règles de vie commune qui interdisent, par exemple, de tenir des propos racistes ou antisémites. D’où ces dérapages répétés auxquels on finit par ne plus faire attention. Au risque de rendre légitimes des propos qui étaient hier jugés scandaleux.

La démocratie consiste à organiser des échanges, à confronter des idées, à faire d’une foule qui réagit à ses seules émotions un public qui réfléchit, raisonne et s’oppose sur des arguments. Ces émissions font tout le contraire.

lundi, octobre 17, 2011

Hollande devrait se faire le pédagogue de la crise

La droite reproche donc à François Hollande son inexpérience ministérielle, son manque de contacts à l'étranger. On peut imaginer qu'il va dans les semaines qui viennent multiplier les voyages à l'étranger, rencontrer DSK qui a cette expérience, pour combler cette lacune. Mais peut-être pourrait-il aussi, pour nous convaincre de sa maîtrise des dossiers internationaux, notamment ceux touchant à la crise, nous aider à les comprendre. Il en a les compétences, le talent et sans doute la profondeur de vue nécessaire. Cela mettrait en évidence le terrible silence de Nicolas Sarkozy dont on nous dit qu'il agit mais qui le fait, s'il le fait autant que l'affirment ses partisans, sans grand souci de nous informer.

Plusieurs formats sont envisageables. Des interviews ou des articles dans la presse, des interventions à la radio ou à la télévision, courtes mais ciblées, ou encore un grand débat avec une personnalité incontestable de la droite, Alain Juppé, par exemple, ou mieux encore, Christine Lagarde, si elle se prêtait à l'exercice, sur le modèle de ce qu'avaient réussi dans les années 60 (65 ou 66) Pierre Mendés-France et Michel Debré. Il lui faudrait trouver un partenaire à sa mesure, l'objectif étant moins de vaincre un adversaire que d'apporter aux Français des réponses aux questions qu'ils se posent. Il faudrait que cela se fasse dans le même esprit que les primaires qui ont montré (comme l'avait montré lors de la dernière présidentielle le débat entre Ségolène Royal et François Bayrou) l'intérêt de conversations entre personnalités qui essaient de débattre plutôt que de s'entre-tuer.

Le candidat aurait tout à gagner à un (ou des) exercice de ce type : il montrerait ses compétences, sa connaissance des dossiers mais aussi sa capacité à dialoguer avec des gens qui ne pensent pas comme lui.

dimanche, octobre 16, 2011

Delors et Jospin en pères indignes…

Nous saurons dans quelques heures qui l'a emporté. On a beaucoup dit que le programme de Martine Aubry et celui de François Hollande étaient très proches. Et pour cause, tous deux sont des héritiers directs de Jacques Delors, qu'ils ont accompagné au tout début de leur carrière, et de Lionel Jospin qui leur a donné les positions qui leur ont permis de prétendre à la candidature. Mais on l'a remarqué, ces deux "pères" sont resté bien silencieux tout au long de cette campagne, se refusant obstinément à choisir entre l'une et l'autre. On peut imaginer que François Hollande s'en est accommodé mais que ce fut pour Martine Aubry douloureux. Sans doute aurait-elle aimé que son père affiche, même de manière très discrète, sa préférence. Il ne l'a pas fait. Pour cela, elle en veut sans doute un peu plus encore à François Hollande. Mais si elle est battue, elle saura, en bonne politique qu'elle est, le cacher.

Laurence Parisot chez Ruquier où l'on en vient à regretter Zemmour et Naulleau

Laurent Ruquier a remplacé il y a quelques mois Zemmour et Naulleau par un autre couple : Polony et Pulvar. Il n'a pas gagné au change comme on a pu le voir hier soir en regardant l'interview (mais est-ce bien le mot qui convient?) de Laurence Parisot dans son émission.

Les deux consoeurs sont particulièrement agressives. Et si Audrey Pulvar, plutôt discrète, a posé quelques questions pertinentes, Natasha Polony qui n'a ni la culture ni, plus grave, l'honnêteté intellectuelle d'Eric Zemmour, s'est révélée particulièrement déplaisante. Elle ne se contente pas de couper systématiquement la parole de son interlocuteur, lui interdisant d'aller au bout de ses phrases, elle multiplie les approximations, les interjections populistes et les confusions : comparer, comme elle l'a fait, les analyses de Jacques Sapir et le programme économique du FN relève, non pas de l'à peu près journalistique mais du manquement aux règles élémentaires du débat public. Erreur d'autant plus grave que ceux qui n'ont pas lu Sapir (c'était apparemment le cas de Laurence Parisot) pourraient penser qu'il a des positions proches de celles du Front National. Ce qui n'est évidemment pas le cas. On aurait aimé qu'Audrey Pulvar qui connaît certainement Sapir (un économiste proche de Montebourg) corrige sa collègue. De même, on se demande où Polony a trouvé que la gauche a, dans les années 80, dit que l'immigration faisait baisser les salaires. C'était (et cela reste) un thème classique de l'extrême-droite.

On sort de l'interview de l'auteur d'un livre qui dénonce le Front National avec des analyses qui paraissent, pour ce que l'on peut malgré tout en deviner, intéressantes, sans rien savoir de ce qu'elle dit mais avec le sentiment que c'est une erreur de se battre contre le FN, que l'antisémitisme des Le Pen n'est pas une question grave, que si des électeurs votent à l'extrême-droite c'est de la faute des banques… ce qui n'est qu'une forme particulièrement perverse de populisme.

De manière plus générale, cette manière de mener des entretiens avec des interjections permanentes favorise les platitudes et interdit à la personne interrogée de s'exprimer. Laurence Parisot qui a dirigé l'IFOP et qui, elle l'a rappelé, avait annoncé plusieurs semaines avant que Le Pen serait au second tour, avait des choses intéressantes à dire sur l'électorat du FN. On ne l'a pas laissée développer alors même qu'elle était partie pour nuancer la vision dominante d'un électorat populaire formé d'anciens électeurs du Parti Communiste.

Il faudra un jour décrire le jeu malsain que les médias jouent depuis quelques mois, depuis en fait que Martine Le Pen est montée haut dans les sondages. Sous couvert de donner la parole au "peuple", on s'inscrit dans une logique populiste. On en a avec Natasha Polony une variante "familiale" : on pourrait être dans un de ce dîners de famille où l'on parle de politique et se dispute. Une autre, plus pénible encore, se trouve sur toutes ces radios qui donnent en permanence la parole à leurs auditeurs, qui se nourrissent de leurs dérapages et donnent un statut public à des propos que l'on tenait en général en privé ou en petit comité.

mardi, octobre 11, 2011

La lettre de Montebourg : tout ça pour ça?

Arnaud Montebourg a donc publié sa lettre aux deux candidats restés en lice que l'on peut trouver ici. On ne voit pas bien, à première lecture, et à deux ou trois exceptions près, ce qui pourrait, dedans, poser grave problème à Aubry ou Hollande. Derrière le ton grandiloquent, il y a beaucoup de choses que l'on trouve dans le programme de l'un et de l'autre, voire même comme Montebourg l'avoue à la fin de son texte dans une phrase pour le moins surprenante dans celui que Nicolas Sarkozy pourrait proposer aux Français. On a vu plus révolutionnaire!

Si l'on retire quelques effets de manche et les quelques mots qui donnent encore de l'urticaire aux bien pensants, il ne reste pas grand chose. Que demande-t-il en effet? que l'Etat entre dans le conseil d'administration des banques qu'il recapitalise? Mais c'est bien le moins. Que l'on sépare les activités de marché des activités de banque de détail? Mais tout le monde, ou presque, le souhaite. Que l'on négocie plus durement avec les pays émergents qui ne respectent pas des règles sociales élémentaires? Mais aucun gouvernement n'est hostile à cela. Que l'on sanctionne les entreprises qui délocalisent? On peut toujours le promettre. Idem sur le plan institutionnel…

Aubry et Hollande devraient tous deux reprendre l'essentiel d'idées qui sont déjà les leurs.  Montebourg a eu dans le passé du courage quand il s'est attaqué à la corruption, à Chirac ou à Guerini. Il a, dans cette campagne, gagné en volume mais perdu de son tranchant.


Arnaud Montebourg ou la grenouille qui veut se faire aussi grosse que le boeuf…

C'est le moment Montebourg, il en profite mais à trop en faire il va finir par ressembler à cette grenouille qui voulait se faire boeuf et qui "S'enfla si bien qu'elle creva." J'ai rarement vu autant d'arrogance en si peu de lignes que dans l'interview que M.17,2%  a donnée ce matin à Libération. Un extrait pour ceux qui n'auraient pas lu ce morceau de prose : "J'ai pu proposer aux Français des idées politiques innovantes et des solutions nouvelles de nature à faire bouger la gauche. La société s'est engouffrée dans cette offre politique. Cette primaire (lire "ma contribution à cette primaire") a créé les conditions d'un bouleversement de l'offre politique et d'un PS tombé dans le formol dés les années 90." Allons, M.Montebourg, vous n'avez pas tant innové que cela, vous avez donné un nom élégant à ce que l'on appelait autrefois le protectionnisme, rien de plus, et la France ne s'est pas à ma connaissance engouffrée dans votre offre politique. Juste 17,2% des participants aux primaires citoyennes ont trouvé vos idées séduisantes. Ce n'est pas mal, mais vous êtes bien loin des performances de Ségolène Royal qui avec des idées, il est vrai autrement innovantes, avait su recueillir sur son nom, 60% des suffrages des militants socialistes.

dure ou brutale?

Hollande serait donc, à entendre les amis de Martine Aubry, un socialiste mou auquel il conviendrait d'opposer un socialisme plus… dur. Mais attention dur et brutal sont très proches. Et Martine Aubry devrait se méfier : la fermeté de la dame des 35 heures n'a pas laissé que de bons souvenirs. Quant à la brutalité, les Français l'ont abondamment goûtée ces quatre dernières années avec Nicolas Sarkozy et ils en ont soupé.

De manière plus générale, l'histoire récente nous l'enseigne : plus une réforme est brutale plus elle a de chance d'être rapidement détricotée.

Ce sont donc des impétrants

Tout auréolé de ses 17% Arnaud Montebourg vient donc d'introduire dans le vocabulaire politique un mot nouveau pour désigner les deux finalistes de ces primaires citoyennes : impétrant. Mot qu'il n'utilise pas tout à fait à bon escient : l'impétrant est, nous dit le Trésor de la langue française, "celui (celle) qui a obtenu de l'autorité compétente ce qu'il (elle) avait sollicité (charge, titre, privilège)". Peut-on qualifier les électeurs d'autorité compétente? L'expression a une dimension administrative qui convient mal.

Ce mot est rare, ce qui donne à Montebourg un petit air cultivé qu'il affectionne (il est vrai qu'il est avec Hollande, celui qui s'exprime le mieux). Il est laid et légèrement dépréciatif, ce qui lui permet de marquer une certaine distance à l'égard de ses concurrents, de prendre de la hauteur et de donner une valeur qu'ils n'ont pas à ses 17% qui restent, quoi qu'on dise, bien peu : près de 80% des électeurs qui ont participé à ces primaires ne sont pas des fans de la démondialisation et de la mise sous tutelle des banques.

C'est habile, mais aussi un peu déplaisant.

lundi, octobre 10, 2011

Le match Hollande-Aubry


Thierry Desjardins interprète ces résultats comme le signe d'un glissement à gauche de l'électorat de gauche. Ce qui promettrait de bons résultats pour Jean-Luc Mélenchon lors de la prochaine présidentielle. On peut effectivement interpréter le succès de Montebourg de cette manière. On peut également l'attribuer à son talent, à sa capacité à proposer une solution indolore à la sortie de crise quand ses concurrents ne proposent que du sang et des larmes, je veux dire des augmentations d'impôts. Là où Hollande, Vals, mais aussi Aubry demandent des efforts aux Français, il en promet pour les Chinois, c'est tout différent. Est-ce être plus à gauche?

L'échec de Ségolène Royal sonne comme un avertissement à tous ceux qui seraient tentés par le populisme. Le corps électoral ne s'est pas laissé séduire par les solutions trop simples, du type interdiction des licenciements boursiers qu'elle mettait en avant. Et celui de Vals comme un avertissement à tous ceux qui seraient tentés par la reprise des thèmes de droite. Les électeurs de gauche ne veulent certainement pas d'un sarkozysme light.

Une chose en tout cas est sure : l'incertitude durera donc jusqu'au dernier moment. Aubry parait la mieux placée (ses voix + celles de Montebourg et Royal > à celles de Hollande + Valls + Beylet) mais l'alliance Aubry-DSK peut inquiéter ceux à la recherche d'une gauche "dure" tandis que la mésentente entre Aubry et Montebourg peut inciter celui-ci à choisir Hollande ou à s'abstenir de toute recommandation. Beaucoup devrait en fait dépendre des prochains sondages sur la présidentielle, celui qui passera pour le meilleur candidat face à Nicolas Sarkozy aura un avantage majeur, et, bien sûr, du débat de mercredi. Hollande que l'on présente comme un mou, mais qui sait être ferme comme le montre ses réponses à l'interview musclée de Mediapart, va devoir se montrer extrêmement convaincant, dominateur ou, plutôt, surplombant (il faut qu'il donne l'image du Président face à son Premier Ministre) mais aussi capable d'écoute, avec une vision sur le moyen terme qui l'exonère de l'obligation d'entrer, comme le fait si volontiers Martine Aubry, dans le détail des mesures à prendre. Il faudra, en somme, qu'il se révèle présidentiel.

On dit que Hollande et Aubry ne s'aiment guère (mais Aubry et Montebourg ne s'aiment pas beaucoup non plus et l'on sait que les relations de Martine Aubry et Ségolène Royal ont longtemps été difficiles), mais ils sont sur le fond assez proches. On va chercher des nuances, mais ils sont plutôt bonnet blanc et blanc bonnet. Et l'important est moins qui l'emporte que de savoir si celui qui l'emportera dimanche soir sortira de cette élection avec une légitimité assez forte pour entraîner derrière lui toute la gauche sans arrières pensées? C'est ce qui avait manqué à Ségolène Royal. Il est vrai que cette fois-ci les choses ont changé : la volonté d'en finir avec la présidence Sarkozy peut faire oublier bien des rancoeurs.

dimanche, octobre 09, 2011

Martin Hirsch face à des électeurs du Front National

Rue 89 a eu une excellente idée : faire dialoguer des électeurs (pas des responsables, des électeurs ordinaires) du Front National avec Martin Hirsch. Le résultat est étonnant et passionnant. On découvre, d'abord, que ces électeurs viennent de partout : il y a une immigrée marocaine qui sert d'interprète français-arabe pour la police de l'air et des frontières, un homosexuel hostile au communautarisme, un vigneron, un gardien de prison et deux cadres, dont un abonné au chômage. Et que leurs discours sont, pour l'essentiel, nourris de ce populisme dans l'air du temps que les émissions de dialogue à la radio à la RMC entretiennent en permanence.

Peu de choses les réunissent sinon un anti-islamisme virulent, un certain goût pour le protectionnisme et beaucoup de contradictions. Je n'en retiendrai qu'une : d'un coté, l'un des participants s'en prend à ces chômeurs qui refusent des emplois de crainte d'un déclassement, de l'autre, un autre participant vote FN à cause de ce même déclassement.

Je me demande si nos politiques ne gagneraient pas à faire comme Martin Hirsch, à prendre le temps d'aller à la rencontre de ces électeurs, non pas pour leur dire qu'ils ont raison et qu'ils les ont compris mais pour leur montrer, comme fit içi, Martin Hirsch, combien ils ont tort. Ce serait la meilleure manière d'en ramener quelques uns au bon sens.

vendredi, octobre 07, 2011

Hollande en nouveau Balladur?

La droite a choisi, d'après le Monde d'aujourd'hui, d'entamer le procés en balladurisme de François Hollande. Idée étrange pour au moins deux motifs :
- Balladur n'a jamais eu de mou que son allure. Pendant qu'il était au gouvernement, il s'est au contraire montré plutôt intraitable,
- Le premier et plus constant soutien de Balladur, lorsque celui-ci se fut déclaré candidat à l'élection présidentielle, s'appelait… Nicolas Sarkozy.

Que la droite en soit réduite à ce mauvais argument ("une idée à la con" dit un conseiller anonyme de l'Elysée que cite Le Monde) montre simplement que la droite n'a pas trouvé d'angle d'attaque pour s'en prendre à François Hollande. Il lui reste quelques jours pour chercher et trouver.

14 909€

C'est un m2 dessiné sur la chaussée, juste devant l'IEP, rue Saint-Guillaume dans le septième arrondissement, dans l'un des quartiers les plus chers de Paris. Avec un prix, celui justement de ce m2.


Il n'y a pas de signature.

Cette intervention peut être le fait de militants de gauche qui protestent contre la spéculation immobilière, mais aussi d'étudiants qui n'en peuvent plus de payer des loyers extravagants pour des studettes dans le quartier. On peut hésiter même si les deux sujets sont distincts. Les loyers élevés des studettes sont, pour beaucoup, un simple effet de redistribution de l'APL (Aide Personnalisée au Logement que les Caisses d'Allocation Familiale versent aux étudiants pour les aider à se loger) vers les propriétaires qui auraient sans doute bien du mal à trouver des locataires à ces prix sans cette aide apportée à leurs locataires. Le prix élevé du m2 tient lui beaucoup plus à a rareté de l'offre dans une grande capitale qui reste cependant une petite ville.

Drôle d'affaire Neyret

Les développements de l'affaire Neyret, du nom de ce commissaire de police aujourd'hui emprisonné, nous éclaire probablement plus que bien des reportages sur l'atmosphère et les comportements dans les services de police. On y découvre, d'abord, la pertinence de mythes que l'on croyait réservés aux romans policiers à la française des années cinquante. Interrogé sur la notion de flic à l'ancienne, Christian Lothion, le directeur central de la police judiciaire répond "ce n'est pas un mythe" avant de se lancer dans une défense et illustration assez inattendue du pif et des "amigos", nom que Neyret donnait semble-t-il à ses indicateurs.

On y apprend aussi que les séries télévisées américaines sont montées à la tête de certains policiers, de ceux au moins qui trouvent normal de circuler dans des voitures de luxe et d'entretenir des relations d'amitié avec des voyous.

Mais le plus surprenant est certainement la manière dont l'institution a lâché Neyret. Nul ne l'a soutenu, n'a protesté contre sa mise en examen et son incarcération. Tout se passe comme si tout le monde, sa hiérarchie, ses collègues savaient qu'il filait depuis quelque temps un mauvais coton. On aurait aimé que l'institution, ses collègues le contrôlent mieux, lui évitent de commettre ce qu'il appelle lui-même des imprudences, que ceux qui sont mis en examen en sa compagnie se rebellent plus tôt et refusent de lui obéir. Mais le fait est que personne ne tente aujourd'hui de le couvrir, ce qui n'est pas toujours le cas dans la police. Ce que l'on peut interpréter de deux manières contradictoires :
- les faits sont très graves, plus qu'on ne le soupçonne, et il est vraiment absolument indéfendable même pour les plus complaisants,
- les services de police judiciaire ont conservé une éthique qui leur interdit de couvrir des délits avérés même lorsqu'ils sont le fait d'un collègue aux qualités reconnues.


mercredi, octobre 05, 2011

Nicolas Sarkozy a de la chance

Thierry Desjardins, l'un des bloggeurs et publicistes de droite les plus anti-sarkozystes souligne, dans un billet de ce matin, combien son ennemi préféré a toujours eu beaucoup de chance. Et il est vrai qu'après la disparition de DSK, le forfait de Borloo lui donne un peu d'air. Mais avec un peu de cette mauvaise foi qui fait son charme, Desjardins revient sur tous les moments forts de la carrière de Sarkozy (prise de la mairie de Neuilly, du RPR, candidature présidentielle) et assure qu'il les doit moins à son talent qu'à sa chance. Je le disais, il y a dans tout cela un peu de mauvaise foi, mais c'est amusant et pas complètement faux. La chance est un facteur qu'on a trop souvent tendance à ignorer. Il est vrai, comme le disait Pascal, que "la chance favorise ceux qui y sont préparés." Et s'il est une chose que l'on ne peut reprocher à Nicolas Sarkozy, c'est bien de ne pas s'être préparé à saisir sa chance lorsqu'elle se présentait.

lundi, octobre 03, 2011

Mouvements de troupe à droite et à gauche

Borloo s'est donc écrasé avant même d'avoir pris son envol. Sarkozy a choisi de fuir et de parcourir le monde pour mieux oublier ses déboires hexagonaux (qui a pu lui conseiller d'aller inaugurer un TGV marocain?) tandis que Juppé, toujours hésitant sur le bord de la plage voit gonfler la vague qui pourrait porter sa candidature. Cela commence par un sondage flatteur, cela devrait se poursuivre dans les jours qui viennent par quelques déclarations d'amour de députés UMP inquiets pour leur réélection. On peut d'ores et déjà imaginer Raffarin, Dati et quelques autres déçus du sarkozysme inciter les plus intrépides à se lancer.

Les centristes, Bayrou et Morin, sont étrangement silencieux. Le départ de Borloo devrait leur ouvrir un espace mais peut-être font-ils la même analyse : le centre s'est évaporé, plus de troupes, plus d'élus, ne reste qu'un souvenir.

A gauche, un prétendant inattendu à l'héritage de Dominique Strauss-Kahn a fait son apparition : Manuel Valls, qui a repris le titre de socialiste préféré des électeurs de droite (34% de popularité dans le sondage cité). Cela ne fait pas une élection à gauche, mais cela permet de poser des jalons lorsqu'il faudra, dans un prochain gouvernement socialiste, donner des gages à la droite modérée. Mitterrand avait utilisé d'anciens industriels comme Pierre Dreyfus, éphémère ministre de l'industrie en 1981 pour rassurer les milieux économiques, un gouvernement de gauche n'aurait pas à chercher aussi loin : Valls fera parfaitement l'affaire.

dimanche, octobre 02, 2011

Double peine pour une veste de Président.

Ce jeune homme avait eu la malencontreuse, mais sans doute bien excusable, idée d'attraper par le col de sa veste Nicolas Sarkozy, alors que celui-ci était en déplacement officiel, pour lui signaler son mécontentement. Geste inconsidéré? Sans doute, mais très chèrement payé, et doublement, comme nous le raconte Sud-Ouest : "A 14 h 45, le conseil de discipline agenais rendait son avis : deux ans de mise à pied dont dix-huit mois avec sursis à l'encontre d'Hermann Fuster, employé municipal agenais en charge de l'accueil au conservatoire à rayonnement départemental de musique et de danse d'Agen. Cinq heures plus tôt, celui qui a agrippé le président de la République, Nicolas Sarkozy, le 30 juin dernier à Brax, arrivait au centre de gestion de la fonction publique territoriale d'Agen, accompagné de son conseil agenais, Me Laurent Bruneau et d'un comité de soutien composé de parents et enseignants du conservatoire, d'amis, de représentants syndicaux CGT et d'anonymes. Au total, une trentaine de personnes venues demander par sa seule présence la clémence pour cet agent, âgé de 32 ans. Car rappelons qu'Hermann Fuster avait été jugé au lendemain, des faits par la justice pénale, écopant d'une condamnation du tribunal correctionnel d'Agen à six mois de prison avec sursis et trois ans de mise à l'épreuve."

Faisons l'addition : six mois de prison avec sursis + trois ans de mise à l'épreuve + deux ans de mise à pied (dont, heureusement, dix-huit avec sursis). En ces temps de scandales multiples qui touchent l'entourage de l'homme dont la veste avait été froissée, de non-lieu demandé pour un ancien Président de la République, on se dit que nous ne pesons pas tous du même poids au regard des institutions.

Affaire Takiédine : une étrange conception de l'Etat

Les économistes ont longuement discuté du rôle de l'Etat dans l'économie. On le savait investisseur, régulateur, éventuellement entrepreneur, souvent client, on le découvre, à l'occasion de cette affaire Takiédine, agent commercial de quelques grandes entreprises.

Ce n'est pas une totale découverte, nos Présidents ont toujours aimé emmener dans leurs voyages des chefs d'entreprise, ils nous ont souvent infligé des photos de signatures de contrat à la soviétique, mais on ne prenait pas cela au sérieux. On n'y voyait qu'une manière de faire leur publicité. On découvre que c'est tout à fait sérieux, que les plus hautes instances de l'Etat participent aux négociations, prennent des avions en cachette pour rencontrer des clients et faire le travail des directions commerciales, négocier des faveurs diplomatiques contre des contrats pour quelques entreprises amies ou publiques.

C'est évidemment très malsain. On comprend bien l'ambition des politiques : apporter du travail aux entreprises françaises, mais lorsqu'on lit dans l'interview que Takiédine a donnée à Libération, que Balladur attendait de la signature du contrat sur les vedettes (trois vedettes) la création de 25 000 emplois, on se pince. Où sont-ils? Et que sont-ils devenus maintenant que ces vedettes ont été livrées? Les politiques se laisseraient intoxiquer par les entreprises qui sollicitent leur aide que je ne serais pas autrement surpris.

Comment, par ailleurs, éviter que les entreprises bénéficiaires ne renvoient l'ascenseur. Dans l'affaire Takiédine, cela est passé par des rétrocommissions qui sont illégales, mais quand Dassault rachète le Figaro dont il fait un tract de propagande pour l'Elysée, il renvoie également l'ascenseur tout à fait légalement.

Il serait bon qu'à l'occasion de la prochaine campagne présidentielle, la gauche mette ce sujet sur le tapis et rappelle que nous n'élisons pas un super directeur commercial mais un Président de la République. Ce n'est pas la même chose.

samedi, octobre 01, 2011

Les chances de Juppé

Alain Juppé est donc sorti du bois. Avec prudence, sans s'engager, mais il a envoyé un signal à tous ceux qui à droite désespèrent de Nicolas Sarkozy, ce qui fait chaque jour un peu plus de monde. Et c'était l'essentiel. Inutile d'en faire plus, il lui suffit d'attendre que le processus de décomposition de la droite s'accélère pour cueillir le fruit mûr. Il peut d'autant plus attendre que personne d'autre à droite ne semble avoir l'audace de se lancer, pas même Borloo qui gâche un peu plus chaque jour ses chances.

A d'autres maintenant de jouer, de suggérer que l'actuel Président ne ferait pas le meilleur candidat de la droite. On peut parier qu'ils seront nombreux parce que la récente prestation de Juppé à la télévision a impressionné : il y a fait preuve d'autorité, de sérieux, de connaissance des dossiers, de calme aussi. Il a rappelé, de manière subliminale, qu'il avait des atouts : son caractère, son expérience, son style (qui le rapproche chaque jour un peu plus de Giscard d'Estaing moins cette élégance précieuse qui fait le charme de notre ancien Président, moins également son amertume), sa capacité à prendre des coups. Il aurait tout d'un recours pour la droite s'il n'avait une faiblesse : sa loyauté. Elle lui a coûté très cher du temps de Chirac, elle pourrait, cette fois-ci, lui interdire de jouer sa chance.

Mais avouons-le : un débat entre Hollande ou Aubry et Juppé aurait de l'allure et serait de nature à réveiller chez les plus âgés le souvenir des débats entre Debré et Mendés-France.