jeudi, juin 23, 2005

Pour tous ceux que Bourdieu met mal à l'aise…

A tous ceux que la lecture de Pierre Bourdieu met mal à l'aise, à tous ceux que ses thèses qui lui permettent de se mettre, lui, l'intellectuel en dehors des classes sociales qu'il décrit, je recommande l'excellent livre de Louis Gruel, tout simplement intitulé Pierre Bourdieu illusionniste aux éditions des Presses Universitaires de Rennes. L'auteur, sociologue y démonte piècesà l'appui les tricheries, à peu près et ruses rhétoriques utilisées par le sociologue. Un délice. plus qu'un délice, une illustration de ce qu'il aurait fallu faire lorsque Bourdieu était encore vivant. Cela nous aurait valu de belles empoignades, mais aussi peut-être des progrès scientifiques.

mercredi, juin 22, 2005

Immigraton : une étude à lire

Extrait d'une dépêche de la BBC qui fait référence à une étude de l'IOM (International Organization for migration) que l'on peut trouver ici

Migration is 'good for everybody'

Migrant workers send their earnings back home across the globe
Migrants can bring many benefits to both the countries they move to and the ones they leave behind, according to a major new study.

The International Organization for Migration looked at the costs, benefits and disadvantages of global migration.

It found that common concerns about the negative effects of migration on jobs and welfare costs are often unfounded.

The IOM says there up to 192 million migrants and many bring a wide range of economic and other benefits.

Filling spaces

"We are living in an increasingly globalised world that can no longer depend on domestic labour markets alone. This is a reality that has to be managed," said Brunson McKinley, head of the IOM.

"If managed properly, migration can bring more benefits than costs."

The IOM cites a British report showing that, between 1999 and 2000, migrants in the UK contributed $4bn (£2.1bn) more in taxes than they received in benefits.

And, rather from taking jobs from local workers, the report says that migrants tend to fill spaces at the poles of the labour market - working both in low-skilled, high-risk jobs and highly skilled, well-paid employment.

"There's very little evidence in many of the Western countries that are receiving migrants that migrants are substituting the local workforce," the report's editor, Irena Omelaniuk, added.

The IOM says that migrants make up less than 3% of the global population and that almost half of all migrants are women.

It says that although the number of migrants has risen, from 82m in 1970 to around 190m people today, some countries - including Asia and Africa - have seen their proportional share of migrants decline.

'Brain gain'

The most popular destination countries for migrants include the US - which alone is home to more than 20% of the world's migrants - and Russia, home to almost 8% of global migrants.

Migrants make a significant contribution to the economies of their home states, the report says, with returning cash flows sometimes exceeding official development aid.

Migrant workers sent back more than $100bn (£55bn) to their countries of origin in 2004 and the report estimates that more than double this figure may also be sent through informal channels.

Morocco, the report says, received $2.87bn (£1.57bn), or 8% of its GDP, from money sent home by migrant workers in 2002 and remittances sent to The Philippines accounted for almost 10% of its GDP.

The report says that, although many skilled workers abandon their home countries seeking higher pay abroad, many can be encouraged to return home bringing acquired skills and experience - a process of "brain gain".

"Trends suggest a greater movement towards circular migration, with substantial benefits to both home and host societies," the report says.

dimanche, juin 19, 2005

Une film à éviter : Les poupées russes

J'avais gardé un plutôt bon souvenir de l'Auberge espagnole. J'attendais donc beaucoup des Poupées russes, le derier Klapisch. Je suis tombé de haut, de très haut. Non seulement, c'est long à mourir, j'ai regardé au moins cinq, six fois ma montre, mais cela ressemble à du Lelouch (chabada, chabada, version je ne sais pas très bien quel partenaire choisir?) pour la profondeur des idées et des sentiments. La mise en scène est quelconque. Il n'y a que la direction d'acteurs qui soit bonne. Ce qui m'a fait penser à un film réalisé pour répondre à la commande d'une agence de casting. Chaque comédien joue un bout de rôle qui le met en valeur puis s'en va. Ce qui fait qu'on a le sentiment en sortant que l'on aurait pu suppimer à peu près n'importe quel personnage (la mère, la vendeuse sénégalaise, le frère et son épouse russe, l'ex…) sans que le film perde quoi que ce soit. J'ajouterai qu'il y a dans ce film un petit quelque chose de déplaisant : il se moque des téléfilms et il nous en montre un tellement ridicule que l'on ne peut s'empêcher de penser que l'auteur n'est pas tout à fait honnête. Il est vrai que son film fera les délices d'une chaine privée qui a le droit de couper les films de tunnels publicitaires.
Deux heures de perdues que j'aurais mieux fait de passer à poursuivre la lecture du Dostaler sur Keynes (Keynes et ses combats chez Albin Michel) qui, et c'est sans doute une première, nous propose une biographie d'un économiste dans son siècle. Le livre a le mérite de nous faire découvrir des facettes de Keynes que l'on connaît mal en général (ses goûts esthétiques, sa philosophie morale…)

Il parait que le non au référendum allait aider à la création d'une Europe plus sociale…

Les partisans du non de gauche nous assuraient que leur vote allait favoriser l'émergence d'une Europe plus sociale. Si j'en juge par ce qu'écrit le Monde à la suite du double échec du sommet de Luxembourg, c'est plutôt le contraire qui risque de se produire :
"Le programme de la présidence britannique sera rendu public le 23 juin. Le chancelier de l'Echiquier, Gordon Brown, en a donné un aperçu le 26 mai, dans une communication au Parlement britannique, en souhaitant que l'Europe réforme le marché du travail, réduise les subventions publiques, achève la libéralisation du marché de l'énergie, crée un marché financier libre transatlantique. M. Blair sera notamment attendu sur deux projets controversés en discussion à Bruxelles, la directive Bolkestein sur la libéralisation des services et la directive sur la durée du travail, que la Grande-Bretagne veut assouplir."
C'était prévisible et nous avions été nombreux à le dire, mais on nous accusait alors de ne pas prendre au sérieux la voix de la France dans le concert européen. C'est vrai : nous n'avions pas imaginé que le non de la France entraînerait aussi rapidement les opinions européennes dans un refus de l'Europe qui ressemble trop souvent à une dérive nationaliste.

samedi, juin 18, 2005

Propriété intellectuelle et liberté d'expression

J'ai depuis longtemps le sentiment (c'est plutôt une intuition) qu'une protection trop féroce de la propriété intellectuelle va à l'encontre de la liberté d'expression. En voici une nouvelle illustration, extraite d'une interview d'Elmore Leonard, un auteur de romans policiers, publiée dans la dernière livraison de Time (celle datée du 20 juin 2005). Le journaliste lui demande pourquoi il n'a pas un personnage récurrent, à la Philip Marlowe.
Sa réponse : "Je pense qu'il m'ennuierait vite. Après que j'aie vendu City Primeval à United Artist, j'ai utilisé le même personnage dans le livre suivant et mon agent m'a dit : "il faut changer son nom parce que United Artist en est propriétaire et si nous lui vendons pas ce nouveau livre, on ne pourra pas le vendre à d'autres." Alors j'ai changé son nom et allégé sa moustache."
Qu'ajouter à cela? Sinon que cela apporte un peu plus d'eau à mon moulin?

vendredi, juin 17, 2005

Un monde anglo-saxon

Un monde anglo-saxon
Je viens de télécharger sur mon mac un widget, un de ces petits outils gratuits que l’on peut trouver sur le net et qui vous permettent de faire un million de choses (consulter directement l’annuaire des téléphones, la circulation dans Paris, traduire un mot de l’allemand, noter une chose à faier…). Celui-ci est développé par une entreprise qui a eu l’excellente idée de cartographier l’actualité : elle fabrique des cartes qui évaluent le poids des événements du jour (de l’heure…) selon l’importance que leur accorde la presse. C’est une bonne manière de représenter l’actualité. Et c’est, sur le plan technologique, une petite performance même s’il ne s’agit après tout que d’appliquer aux articles de presse une technique que les documentalistes et spécialistes du monde de la recherche connaissent bien (on calcule l’importance d’un papier au nombre de citations dans d’autres papiers scientifiques…). C’est donc un très bel outil qui n’a qu’un défaut : il n’analyse que des articles parus en anglais. Ceci pour de bonnes raisons qu’il serait stupide de critiquer : pour les ingénieurs qui avaient d’autres soucis, c’était évidemment plus simple. Reste que le monde que l’on nous montre est vu au travers de lunettes anglo-saxonnes. Ce qui donne des cartes étranges comme on peut en juger d’après cette liste où à coté de chaque nom de ville est associé un poids :
0. Baghdad (13%)
0. Washington (09%)
0. Gaza (07%)
0. Mosul (07%)
0. Moscow (06%)
0. London (06%)
0. Luxembourg (05%)
0. Pyongyang (05%)
0. Tehran (04%)
0. Brussels (04%)
0. Seoul (04%)
0. New York (03%)
0. Victoria (02%)
0. Berlin (02%)
0. Phnom Penh (01%)
0. Hong Kong (01%)
0. Guatemala (01%)
0. Delhi (01%)
0. New Delhi (01%)
0. Ankara (01%)
Pas besoin d’être grand clerc pour voir que cette hiérarchie correspond à celle des préoccupations, non pas de l’administration américaine, pas même de la presse américaine, mais de la presse qui utilise l’anglais comme langue.
Ce n’est pas la première fois que j’observe ce phénomène (voir, par exemple, une amorce d’analyse dans un texte publié il y a quelques années dans les Temps Modernes : quand les économistes veulent enchaîner la démocratie que l’on peut lire sur mon site : la domination modernes passe par d’étranges détours. Elle n’a plus besoin d’armes, de bombes et de soldats, il lui suffit de n’utiliser que la langue dominante pour effacer de la carte des zones entières. Il n’est même pas nécessaire de les détruire ou des les occuper militairement pour les soumettre à la loi du plus fort. J’ajouterai que ce n’est pas tellement surprenant : je me souviens, lycéen traduisant César, de m’être demandé ce que l’on savait de la Gaulle ou de la Germanie en dehors de ce qu’en disait le général romain. Je n’en sais toujours pas plus que ce qu’il en disait.

jeudi, juin 16, 2005

Modèles : et si l’on parlait du modèle japonais en matière de retraite?

On parle ces jours-ci beaucoup du modèle français mais aussi de modèles étrangers dont nous pourrions nous inspirer. L'idée même que l'on puisse, enfin!, regarder ce que font les autres est une bonne nouvelle. Mais il ne faut pas se contenter de regarder ce qu'ils font en matière de chômage, il faut aussi s'intéresser à ce qu'ils font dans d'autres domaines.
Je voudrais aujourd’hui dire un mot du modèle japonais (et, semble-t-il coréen) en matière de retraite qui pourrait un jour inspirer nos politiques. Au Japon, comme en France et en Corée, l’âge de la retraite officiel est à 60 ans (alors qu’il est plutôt de 64 ans dans les autres pays de l’OCDE). Mais, à la différence de ce qui se passe en France, l’âge réel de départ est beaucoup plus tardif : les Coréens et les Japonais continuent de travailler jusqu’aux abords des 70 ans (67 ans pour les Coréens, 69 ans pour les Japonais. En général, cela se passe de la manière suivante : à 60 ans, leur entreprise leur propose un contrat de 5 ans à un salaire plus faible. Lorsqu’ils arrivent à l’âge de 65 ans, ils reprennent une nouvelle activité à un salaire plus faible encore.
Ce mécanisme n’est possible que parce que l’on peut 1) concilier une retraite et une activité professionnelle, ce qui n’est pas le cas en France et 2) parce que les retraites versées par les entreprises ou le gouvernement sont faibles (si le coût du travail au Japon est à peu près comparable au coût du travail en France, la distribution des revenus est différente : une partie plus importante du coût est, chez nous, affecté au paiement de cotisations).
Ce modèle présente deux aspects qui pourraient, un jour, retenir l’attention de nos gouvernants :
- il limite l’effet chômage des plus âgés que notre dispositif encourage : aucune entreprise ne peut recruter un salarié de plus de 55 ans, sachant qu’il la quittera vers soit au moment où sa formation au poste achevée (cela demande selon les postes de quelques semaines à quelques mois), il est devenu pleinement opérationnel. Le taux de participation des personnes âgées de plus de 55 ans au marché du travail (actifs ou à la recherche d’un emploi) est de l’ordre de 40% en France, il est de l’ordre de 90% au Japon et supérieur à 70% pour les hommes de plus de 60 ans ;
- il compense les faiblesses des pensions, un problème dont on parle peu mais qui se profile à notre horizon, comme commencent à le découvrir sur le terrain les travailleurs sociaux : les différentes réformes de la retraite ont créé et vont créer de plus en plus de retraités pauvres. On peut, d’ailleurs, à ce propos, souligner le véritable piège qu’est devenu le modèle français en la matière : d’un coté, un départ à la retraite précoce réduit fortement le taux d’activité des plus de 54 ans, de l’autre, les réformes de la retraite reposent sur un allongement de la durée des cotisations, ce qui ne peut que conduire à un appauvrissement de la majorité de tous les retraités qui n’ont pas commencé leur carrière professionnelle à 14 ans.
Ce modèle n’est bien évidemment pas satisfaisant, mais il ne faudrait pas qu’on nous le présente dans quelques années comme une évidence et un moindre mal : une évidence pour résoudre les tensions sur le marché du travail qui ne manqueront pas d’apparaître du fait du vieillissement de la population si rien n’est fait pour ouvrir les frontières ; et un moindre mal pour améliorer les revenus de travailleurs âgés mais encore en bonne santé. Or, c’est bien ce qui risque de se produire si on continue de négliger la question de l’âge et de laisser irrésolues les contradictions et difficultés réelles qu’il pose :
- il est vrai que beaucoup de salariés sont fatigués à un âge relativement jeune, d’autant plus fatigués que nous avons un taux de productivité horaire élevé,
- il est également vrai que les salariés âgés sont souvent moins efficaces (parce que fatigués ou dépassés par la technologie),
- mais il est aussi vrai que s’arrêter de travailler à un âge trop précoce n’est pas une solution : cela appauvrit les retraités et crée du chômage chez les plus de 50 ans.

mercredi, juin 15, 2005

Just revenge de Allan M. Dershowitz

Allan Dershowitz est l’un des auteurs qui a le plus milité dans la presse américaine pour une utilisation « mesurée » de la torture au lendemain du 11 septembre (pour en savoir plus sur ses thèses, voir mon texte Torture : l’inquiétante candeur américaine dans les Temps Modernes, mars-juin, 2005). Passant dans une librairie de gare, il y a quelques jours, je tombe sur un roman policier que cet avocat qui enseigne à Harvard, a publié il y a quelques années et que l’on trouve aujourd’hui dans une collection de poche : Just revenge (collection policière du livre de poche). Je l’ai acheté, je l’ai lu. C’est plutôt un bon roman policier, qui se lit d’autant plus agréablement que l’on devine, derrière l’intrigue assez classique (dans une première partie on voit un théologien juif (mais athée) dont toute la famille a été décimée pendant la guerre se venger de manière particulièrement subtile du milicien letton qui a tué toute sa famille ; la seconde partie est, comme dans beaucoup de policiers américains, le récit de son procès) une réflexion sur la revanche et sur la possibilité des institutions contemporaines de juger.
On retrouve, par moments, dans ce texte, où l’on devine les interrogations de l’auteur et, au delà de ses interrogations, une pensée en mouvement, comme un écho aux réflexions de Jankélévitch sur ces mêmes thèmes. On comprend mieux, en le lisant, combien la pensée juive sur l’holocauste, mais aussi sur le conflit israélo-palestinien, a nourri la pensée politique américaine, a renouvelé les thèmes classiques de la revanche, de la violence, de l’impossibilité de pardonner mais aussi de juger. Ce qui, mieux que le poids politique de la communauté juive expliquerait la constance des positions américaines dans le conflit israélo-palestinien : il ne s'agirait pas seulement de real-politik mais aussi d'éthique. J’ajouterai que ce texte ne laisse, dans sa deuxième partie, en rien préjuger des positions de son auteur au lendemain du 11 septembre alors même que sa première partie leur laisse la porte grand ouverte.

Les quotas, l’immigration

Le gouvernement parle depuis quelques jours des quotas en matière d’immigration. Il voudrait, comme le dit Le Monde, trouver le moyen de ne faire venir en France que des immigrés utiles, ceux dont notre économie a besoin. Disons-le tout de suite : c’est un progrès sur les positions antérieures qui revenaient à interdire, dans les discours sinon dans les faits, toute entrée de travailleurs étrangers. Mais c’est plus un progrès dans la symbolique (une reconnaissance de ce que notre économie a besoin de travailleurs étrangers) que dans la réalité. Pourquoi ? Tout simplement, parce que cette position repose sur une triple illusion :
- illusion de croire que nous sommes capables de mesurer nos besoins en matière d’effectifs et de traduire ces besoins en prescription administrative du type : 750 plombiers, 225 tanneurs, 72 psychanalystes… Une entreprise peut le faire puisqu’elle maîtrise les projets qu’elle envisage de développer, un Etat ne peut pas le faire puisque les décisions sont prises par une multitude d’acteurs indépendants qui ne prennent leur décision qu’au vu des disponibilités sur le marché du travail. Les critiques que Hayek faisait la planification sont ici pleinement valides ;
- illusion de croire, à l’inverse de ce que suggère dans son blog Bernard Salanié, que nous n’avons besoin que de gens qualifiés : une jeune sénégalaise sans qualification qui garde des enfant et permet à une mère de famille diplômée de l’enseignement supérieur de prendre un emploi est aussi utile à notre économie qu’une diplômée de l’enseignement supérieur d’origine étrangère. J’ajouterai que la distinction emploi qualifié/emploi non-qualifié perd beaucoup de sa pertinence lorsque l’on se rapproche des emplois réels : l’essentiel des compétences des agents économiques sont aujourd’hui, plus peut-être encore qu'hier, apprises sur le tas. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, le système scolaire agit beaucoup plus comme un moyen de sélection qui donne à l’employeur des informations sur le niveau, la capacité de travail et les préférences des candidats que comme un outil de formation à des compétences qui évoluent en permanence ;
- illusion de penser que l’immigration fonctionne sur le modèle de l’ANPE avec des petites annonces pour des CDD : les immigrés qui viennent se décident pour un emploi, mais aussi pour une carrière. Ils choisissent le pays qui leur offre les meilleures possibilités d’emploi, d’accueil pour leur famille sur la durée. Ce ne sont pas des mercenaires que l’on peut révoquer et renvoyer chez eux à tout instant.
Mais, plutôt que de me citer, j’ai envie de renvoyer sur ces questions les lecteurs à Plaidoyers pour l’immigration, le livre que j’ai publié aux éditions Les Points sur les i en septembre dernier.

mercredi, juin 08, 2005

La réussite de ceux qui échouent

C’est André Laugier qui m’a donné l’idée de cette note : tu devrais, me dit-il, écrire un article sur tous ces gens qui ont échoué et ont malgré tout des promotions. Il faisait naturellement allusion à notre nouveau premier ministre dont personne n’a oublié le rôle dans la dissolution de 1997. Mais très vite notre conversation s’est orientée vers d’autres exemples du même phénomène : Jean-Claude Trichet que le scandale du Crédit Lyonnais n’a pas empêché de devenir Président de la BCE, Serge Tchuruck et quelques autres moins connus que nous croisons dans nos vies professionnelles. Il est vrai que les cas ne sont pas si rares, comme si les échecs n’étaient pas, dans certains contextes au moins, un obstacle à la poursuite d’une carrière brillante. On est tenté de l’expliquer par la puissance des réseaux qui protègent leurs membres. Cela joue certainement un rôle, mais il peut y avoir d’autres facteurs. J’en vois au moins deux : le turn-over rapide des carrières et la complexité des organisations.
On reconnaît dans les entreprises les « hauts potentiels », ces jeunes cadres qui sont appelés à grimper au sommet des hiérarchies, à ce qu’ils changent rapidement de postes de travail : on les fait tourner pour les former à une grande variété de métiers, pour leur donner une vision panoramique de l’entreprise, pour les familiariser avec le changement et les habituer à se plonger rapidement dans des dossiers et domaines nouveaux (c’est une compétence dont on parle peu, elle est cependant très recherchée). Or, le changement rapide de poste a une conséquence majeure : elle interdit de juger des actions entreprises, des décisions prises tout simplement parce que celles-ci ne donnent leurs pleines conséquences (conséquences sur lesquelles il conviendrait de baser son jugement) que plusieurs mois après le départ de leur initiateur. C’est souvent le successeur qui paie les pots cassés ou tire les bénéfices des actions entreprises avant son arrivée. Deux exemples :
- dans les années 70, on a attribué au Directeur général de la RATP de l’époque le bénéfice de l’automatisation des guichets. Il se contentait, en fait, de tirer le bénéfice de la décision difficile prise par son prédécesseur de supprimer les poinçonneurs.
- Le maire actuel de Boulogne passe pour un grand aménageur et il est vrai que la ville a changé depuis que Jean-Pierre Fourcade a pris la mairie, mais les spécialistes qui connaissent le dossier assurent que toutes les décisions importantes avaient été prises par le prédécesseur de son prédécesseur, Georges Gorce.
Première hypothèse, donc : tous ces dirigeants continuent ces brillantes carrières parce qu’ils échappent aux conséquences de leurs actes et sont au sens propre irresponsables. Non pas parce qu’ils auraient un quelconque défaut de personnalité, mais parce que la carrière qui les a menés au sommet a été construite de telle manière qu’ils ne sont jamais jugés sur leurs réalisations effectives.
La complexité des organisations modernes, et c'est ma seconde hypothèse, renforce ce phénomène. Il est, lorsque l’on jette une vue rétrospective sur l’activité des dirigeants souvent très difficile de dire ce qu’ils ont fait, quelles décisions ils ont prises qui ont vraiment changé les choses. Je me souviens d'avoir, à l’occasion d’un travail sur l’histoire des NMPP (que l’on peut trouver sur mon site) demandé aux cadres de cette entreprise de tirer le bilan de leurs différentes directeurs généraux, de me dire en quoi ils avaient vraiement été importants pour l'entreprise. Il leur fallait beaucoup de temps pour trouver une réponse et ils ne trouvaient en général que peu de choses : une décision en dix ou quinze ans à la tête de l'organisation. Ce qui n’est, au fond, pas tellement surprenant : beaucoup d’entreprises (surtout les entreprises bureaucratiques) fonctionnent grâce à leur management intermédiaire qui s’assure que les procédures et les routines sont bien respectées. Mais cela signifie aussi que les réussites ou les échecs ne sont pas (au moins dans ces entreprises de type bureaucratique) forcément de la responsabilité de tel ou tel dirigeant. Je sens bien, en disant cela, combien on peut m’opposer de contre-exemples et de contre-arguments. Et cependant qui, connaissant la complexité des procédures de prise de décision dans les grandes organisations, peut croire que les dirigeants font tant de différence que cela ?
De là à dire que nommer des gens qui ont échoué n’a aucune importance puisque de toutes manières cela ne change rien, il y a un pas que… je ne franchirai pas mais c'est, on l'a deviné, à contre-coeur.

Libertariens : après la torture, le travail forcé

La défense à tous crins de la liberté dans la tradition lockéenne est souvent très proche de formes extrêmes de coercition. Dans un article publié dans la dernière livraison des Temps Modernes (Tortures en Irak, L’inquiétante candeur américaine, Les Temps Modernes, mars-juin 2005), je montre, textes à l’appui comment les dérives de l’armée américaine en Irak et à Gantanamo trouvent l’une de leurs sources (et de leur justification théorique) dans les théories libertariennes, notamment dans les travaux de Robert Nozick qui, dès le début des années 80, développait dans des textes de philosophie morale, la thèse de la ticking bomb (vous venez d’arrêter un terroriste, vous savez qu’il a posé une bombe qui va exploser dans quelques heures, il se tait, vous avez, dit Nozick et après lui quelques autres, le droit de le torturer).
Je tombe sur la revue d’un livre récent d’un libertarien de gauche, M.Otsuka (Libertarianism Without Inequality, Oxford, 2003) qui tente de réconcilier les droits de chacun de profiter pleinement du fruit de son travail et la solidarité à l’égard de ceux qui manquent et souffrent. On sait, en effet, que dans les thèses libertariennes classiques, chacun a le droit de profiter complètement de son travail, complètement voulant dire sans contribuer par l’impôt, le versement de cotisations sociales… à la satisfaction des besoins de ceux qui ont moins de talents, qui sont handicapés, qui ne travaillent plus…(Alain Laurent, l’un des rares auteurs libertariens revendiqués en France titrait en 1991 un de ses livres : Solidaire, si je le veux).
Sa solution : le travail forcé ou quelque chose qui y ressemble beaucoup. En violant les droits des autres, en les volant, par exemple, les criminels ont renoncé à leurs droits : il est donc légitime qu’une partie des richesses qu’ils produisent au delà de ce qui est remis en compensation aux victimes soit confisquée et reversée à ceux qui manquent et sont dans le besoin. Dans le monde des idées qu’Otsuka analyse, il n’y a pas de travail forcé, puisque la ponction sur les revenus se fait en fonction de ce que les criminels décident librement de produire, mais ramené sur terre ce type de raisonnement conduit à justifier l’obligation faite aux prisonniers de travailler pour des salaires insignifiants, comme c’est le cas en Chine, mais aussi aux Etats-Unis.
Dans le même livre, Otsuka envisage la possibilité de créer des sociétés d’esclave : dès lors, dit-il, que je dispose du droit sur ma propre personne, rien ne s’oppose à ce que je me vende et donc à ce qu’émergent des sociétés dans lesquelles il y ait des esclaves. Etrange conclusion pour qui, parti d’une position lockéenne, se veut un impitoyable défenseur des libertés de chacun…

lundi, juin 06, 2005

En bonne compagnie: un film à voir!

Le cinéma a rarement traité de manière très satisfaisante le monde du travail. Il y a des exceptions, bien sûr, comme Le Couperet dont j’ai parlé ici même il y a quelques semaines qui analysait de manière ce que le chômage changeait dans la vie quotidienne, mais le monde de l’entreprise, les tensions qui s’y développent, la manière dont elle sait créer du stress est rarement évoquée de manière satisfaisante. En bonne compagnie des frères Weitz, les auteurs de Pour un garçon, qui se joue actuellement (mais je ne sais pas pour combien de temps) dans quelques salles parisiennes fait heureusement exception. C'est un excellent film, et même si la fin a un coté un peu happy end qui est bien improbable dans la vraie vie, il mérite d’être vu parce qu’il présente une vision très fine, très réaliste aussi, de l’atmosphère des entreprises soumises à des changements de direction, à des opérations de fusion-acquisition. On y voit naître et se développer les rumeurs, les inquiétudes, les paniques morales, les comportements de défense (soumission) qui minent les salariés confrontés à ces situations. Deux scènes se détachent :
- une scène de licenciement où l’on voit les deux attitudes, la révolte inutile et l’acceptation (la victime qui console son bourreau et lui dit combien elle le comprend est un classique de ce genre de situations),
- -et une scène où l’on voit le Président tenir l’un de ces discours sur les synergies qui rappelleront quelque chose à tous ceux qui ont vécu dans une grande entreprise. Ces scènes mériteraient d’être extraites du film et décortiquées.
Ce film ne restera probablement pas très longtemps à l’affiche mais, à défaut de pouvoir le voir sur grand écran, il mérite d’être acheté en dvd.
J’ajoute qu’on ne s’ennuie pas une seconde, que les personnages existent, sont crédibles et les acteurs (Dennuis Quaid, Scarlett Johansson et Tropher Grace) qui les jouent convaincants.

Populiste, démagogue, c'est Attac!

C'est à un de mes correspondants qui signe jeune slovaque que je dois d'avoir reçu une affiche d'Attac que je n'avais pas vue dont voici le texte :

Chez moi, il y a 20% de
chômage, alors je suis venue
travailler ici dans un salon
de massage. Mais je me suis
retrouvée sur le trottoir,
dans les mains de la mafia.
L'Europe est une plaque
tournante de la prostitution,
pourtant la Constitution ne
cherche pas à lutter contre.
Alors, il faut voter non

Si cela ne s'appelle pas de la démagogie…
On peut trouver cette image sur le site d'Attac avec d'autres textes du même foin.

dimanche, juin 05, 2005

Attac, écologistes : des organisations mutantes

Attac et le mouvement écologiste se ressemblent. Ce sont des organisations mutantes qui ont réussi pour le même motif : parce qu’elles ont su réunir, fédérer des militants d’une multitude causes diverses en leur donnant le moyen de travailler ensemble, de se rencontrer, de nouer des alliances, de partager des ressources (librairies, journaux, colloques, fichiers de journalistes…). Les causes sont très diverses (lutte contre les essais sur animaux, contre les OGM, pour le commerce équitable, contre la dette du Tiers-Monde, contre les pesticides…), mais le plus souvent sympathiques (qui peut véritablement défendre les essais sur animaux sinon les experts des industries concernées qui connaissent le dossier et savent que l’on ne peut souvent pas faire autrement ? qui a envie de critiquer la taxe Tobin sinon des économistes professionnels?).
La force des écologistes, celle d’Attac, a été de mettre en réseau ces différentes causes, d’apporter à chacune un espace d’expansion et d’offrir à toutes un ennemi commun : les dérives technicistes pour les écologistes, le libéralisme et la globalisation pour Attac. Ces ennemis sont forcément un peu abstraits (que veut-on donc dire libéralisme ?), mais c’est plutôt une qualité dans la mesure où cela permet de se retrouver sans vraiment approfondir.
Les difficultés commencent lorsque l’on veut entrer dans le jeu politique qui force à préciser ses positions et à se mettre d’accord sur un projet : il ne s’agit plus alors de se réunir entre soi et de parler aux média, il faut choisir entre des positions qui peuvent se révéler contradictoires (si le nucléaire est la meilleure solution pour lutter contre le réchauffement de la planète, comment concilier les objectifs des anti-nucléaires et ceux de ceux qui veulent lutter contre le CO2?) et convaincre des électeurs, ce qui est une toute autre paire de manches. L’incapacité endémique des écologistes à sortir de leurs conflits internes vient sans doute de ce qui leur a, dans un premier temps, permis de grandir. On peut penser que si Attac se transforme en parti politique, comme ses dirigeants en ont la tentation, il rencontrera rapidement le même écueil.

Antiparlementarisme de gauche?

La campagne électorale qui vient de s’achever a mis en évidence l’émergence à gauche, d’une variante de l’antiparlementarisme qui est, comme chacun sait, une des composantes majeures de tout populisme.
C’est le soir de l’élection que cette tentation de l’antiparlementarisme s’est révélée le plus nettement dans un lapsus d’Emmanuelli à propos du vote des Allemands. Les Allemands, dit-il, n’ont pas voté la constitution et lorsque ses interlocuteurs lui ont fait remarquer que le Parlement allemand venait justement de voter la constitution, plutôt que de se taire, il en a rajouté, expliquant que le vote du Parlement ne valait rien. Pour un socialiste qui a longtemps pensé que le référendum n’est pas une procédure démocratique, la remarque était pour le moins surprenante.
Cet échange pourrait n’être qu’anecdotique, ce ne serait pas la première fois qu’un politique fatigué aurait dit une sottise, et je n’y ferais pas allusion s’il ne s’inscrivait sur un fond. Je pense au refus de respecter les règles élémentaires de la démocratie de ces socialistes qui ont fait campagne pour le non contre l’avis de la majorité des militants de leur parti, mais aussi au discours que l’on tient depuis quelques jours chez les partisans du non sur l’opposition entre les élites qui ont voté oui et le peuple qui a voté non, opposition qui n’est, faut-il le rappeler, qu’une reprise de la vieille rengaine réactionnaire du pays réel et du pays légal.
Cet antiparlementarisme se nourrit probablement de l’incapacité du système politique à transformer les choix des électeurs en politiques les satisfaisant (le refus de Chirac de changer de premier ministre et de politique après ses échecs électoraux répétés peut faire penser que voter ne sert à rien) mais aussi de la montée d’une abstention qui n’est pas forcément synonyme de désintérêt pour la politique comme en témoigne la présence dans la rue au lendemain du premier tour de l’élection présidentielle de dizaines de milliers de jeunes qui s’étaient abstenus ou même pas inscrits sur les listes électorales.
Reste que l’émergence (peut-être éphémère) d’un antiparlementarisme de gauche n’est pas une bonne nouvelle.

vendredi, juin 03, 2005

Le principal adversaire de la gauche est aujourd’hui l’extrême-gauche

Si la victoire du non est une véritable défaite pour la gauche démocrate, réformiste, social-démocrate comme on dit, celle qui, en un mot, a l’ambition de gouverner pour créer une société moins inégalitaire qui se préoccupe plus du bien-être de chacun, c’est une splendide victoire pour l'extrême-gauche qui avait déjà battu Jospin aux dernières élections présidentielles.
La stratégie de cette extrême-gauche est assez simple, presque simpliste : affaiblir ses proches et faire gagner l’ennemi pour se renforcer. Lorsque la droite est au pouvoir, il lui est plus facile de mobiliser les électeurs de gauche que lorsqu’elle est dans l’opposition. Mieux vaut donc, en France, Chirac que Jospin et demain Sarkozy que Hollande (ou Fabius) à la tête de l’Etat. Et mieux vaut une Europe à la britannique, zone de libre-échange, qu’une Europe politique comme la souhaitaient les auteurs de la constitution.
Si tant de gens à gauche lui apportent leur voix, c’est qu’ils ne la prennent pas vraiment au sérieux. On vote pour l’extrême-gauche pour se défouler, pour dire sa colère comme d’autres votent pour le Front National ou les chasseurs. Mais comment peut-on éprouver de la sympathie pour des gens qui continuent de défendre à longueur de colonnes la dictature du prolétariat ? Dans un état démocratique, cela devrait immédiatement déconsidérer ceux qui continuent de la prôner.
Comment peut-on un instant tolérer que des communistes s’en prennent aux plombiers polonais quand pendant des décennies leur parti s’est fait le complice complaisant des dictatures à l’Est ? Dictatures qui furent, on a presque honte de le rappeler, abominables et que le PCF n’a jamais condamnées sinon du bout des lèvres (et encore !).
Comment peut-on admettre qu’Attac qui demande tous les matins que l’on annule la dette des pays du Tiers-Monde s’en prenne au libre-échange qui, seul, permettrait à ces pays endettés de rembourser leur dette ?
Comment peut-on, enfin, éprouver le moindre respect pour des militants socialistes qui ont rejeté le vote des militants de leur propre parti ?
On a trop souvent deviné le nationalisme et le populisme dans les argumentaires des partisans de gauche du non pour prendre ces dérives à la légère. L’inquiétude est d’autant plus justifiée qu’un sondage récent indique que 41% des électeurs de gauche qui ont voté non trouvent qu’il y a trop d’étrangers en France.
La gauche qui prétend gouverner, celle dont nous avons besoin, n’a plus besoin de se battre contre une droite qui a montré son incompétence et son incapacité à résoudre nos problèmes, elle doit concentrer ses forces contre la séduction idéologique d’une extrême-gauche populiste qui n’a qu’un objectif : lui faire perdre les élections pour mieux prospérer. Cette bataille doit se mener sur plan des idées, sur celui des projets, sur celui, également, des réalisations. Où sont donc les propositions de Besancenot-Buffet-Nikonoff? En quoi consistent-elles sinon à fermer les frontières, à abandonner l'euro, à revenir au monde d'hier ou d'avant-hier? celui dont peinent à sortir les pays de l'Est, Cuba ou pire encore la Corée.
On voit ici ou là des responsables de gauche tentés de se concilier l’extrême-gauche nationaliste et populiste. S’ils pensent pouvoir la convaincre de les aider à accéder au pouvoir, ils se trompent lourdement. Ils n’ont pas de prise sur des dirigeants qui n’ont aucune envie de devenir ministres. Leur position dans le jeu politique leur convient : elle leur apporte les bénéfices symboliques qu’ils en attendent et le pouvoir qu’ils exercent dans leurs organisations respectives leur suffit.
L’extrême-gauche n'est pas et ne peut être un allié fiable pour un parti qui souhaite revenir aux affaires. Ses programmes sont incohérents, ses projets irréalistes (qui peut une seconde prendre au sérieux la taxe Tobin? Même Tobin en riait), elle ne respecte aucune des règles de la démocratie et a toujours préféré la rue aux urnes. Elle devrait appartenir aux marges de la politique. C’est là qu’il faut la renvoyer.

mercredi, juin 01, 2005

Emploi : l’équation insoluble?

Il apparaît de plus en plus nettement que la victoire du non au référendum sur la constitution européenne est directement liée au chômage. On sait tous que le retour de la croissance ne suffira pas, que la France souffre d’un chômage structurel bien plus élevé que la plupart de ses voisins, que les délocalisations, plombiers polonais et autres épouvantails n’y sont pour rien.. C’est chez nous qu’il faut chercher les causes de cette maladie qui nous ronge et nous mine. On les connaît en fait bien et depuis assez longtemps : faiblesse de nos PME incapables de grossir, spécialisation de notre industrie dans des activités qui ne peuvent se développer qu’à l’étranger, corporatismes de toutes sortes qui ferment les marchés des services susceptibles de créer des dizaines de milliers d’emplois, effets contre-productifs des politiques de lutte contre le chômage menées depuis une trentaine d’années. Je les décris plus en détail ici.
Mais, si faire un diagnostic est somme toute facile, trouver les portes de sortie est plus compliqué. La difficulté se résume en un mot : les solutions passent par l’abandon de tout ce qui protège ceux qui ont aujourd’hui une activité (je pense aux salariés mais aussi et surtout aux mécanismes mis en place par les différents corporatismes pour se protéger de la concurrence). Or, la crise incite tout le monde, ceux qui ont un emploi comme ceux qui n’en ont pas à militer pour toujours plus de protection. C’est un véritable cercle vicieux dont je ne vois pas bien qui pourrait aujourd’hui nous sortir.