La campagne électorale qui vient de s’achever a mis en évidence l’émergence à gauche, d’une variante de l’antiparlementarisme qui est, comme chacun sait, une des composantes majeures de tout populisme.
C’est le soir de l’élection que cette tentation de l’antiparlementarisme s’est révélée le plus nettement dans un lapsus d’Emmanuelli à propos du vote des Allemands. Les Allemands, dit-il, n’ont pas voté la constitution et lorsque ses interlocuteurs lui ont fait remarquer que le Parlement allemand venait justement de voter la constitution, plutôt que de se taire, il en a rajouté, expliquant que le vote du Parlement ne valait rien. Pour un socialiste qui a longtemps pensé que le référendum n’est pas une procédure démocratique, la remarque était pour le moins surprenante.
Cet échange pourrait n’être qu’anecdotique, ce ne serait pas la première fois qu’un politique fatigué aurait dit une sottise, et je n’y ferais pas allusion s’il ne s’inscrivait sur un fond. Je pense au refus de respecter les règles élémentaires de la démocratie de ces socialistes qui ont fait campagne pour le non contre l’avis de la majorité des militants de leur parti, mais aussi au discours que l’on tient depuis quelques jours chez les partisans du non sur l’opposition entre les élites qui ont voté oui et le peuple qui a voté non, opposition qui n’est, faut-il le rappeler, qu’une reprise de la vieille rengaine réactionnaire du pays réel et du pays légal.
Cet antiparlementarisme se nourrit probablement de l’incapacité du système politique à transformer les choix des électeurs en politiques les satisfaisant (le refus de Chirac de changer de premier ministre et de politique après ses échecs électoraux répétés peut faire penser que voter ne sert à rien) mais aussi de la montée d’une abstention qui n’est pas forcément synonyme de désintérêt pour la politique comme en témoigne la présence dans la rue au lendemain du premier tour de l’élection présidentielle de dizaines de milliers de jeunes qui s’étaient abstenus ou même pas inscrits sur les listes électorales.
Reste que l’émergence (peut-être éphémère) d’un antiparlementarisme de gauche n’est pas une bonne nouvelle.
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