mercredi, août 08, 2012

L'autre catastrophe européenne : les dérives totalitaires à l'Est

Il en est une menace pour la construction européenne dont on parle bien moins dans les journaux que de la dette, mais dont on commence à sentir les effets dans nos rues : le développement à l'Est, à Roumanie, en Hongrie, en Bulgarie, de régimes autoritaires, réactionnaires, qui tolèrent, voire encouragent le racisme et les discriminations à l'égard de leurs minorités, des Roms, notamment. Ceux-ci tentent d'y échapper en émigrant, en venant s'installer chez nous mais ils le font dans des conditions d''une terrible précarité. Ne parlant pas français, sans compétences professionnelles, venus sans le sou, avec famille et enfants, souvent très jeunes, ils s'installent dans la rue, campent dans des arrêts d'autobus, sous des porches.

Pour l'heure, le dossier est entre les mains du ministère de l'intérieur qui dit vouloir démanteler les camps que certains d'entre eux construisent pour se protéger. Politique de gribouille qui n'aura pour effet que de les disperser et fragiliser un peu plus, au risque de véritables drames sanitaires dans les mois qui viennent. Comment ces enfants qui n'ont souvent pas cinq ans passeront-ils l'hiver si leurs parents ne trouvent pas un toit?

Nous avons, à l'évidence, une obligation de solidarité, de compassion à l'égard de ces populations, nous devons soigner, scolariser ces enfants et trouver une solution pour leurs parents, mais nous n'avons pas vocation à offrir aux régimes autoritaires d'extrême-droite qui s'installent à l'Est une solution facile à leurs problèmes de minorité. Les premiers responsables de l'installation de ces malheureux dans nos rues sont les néo-fascismes qui se développent un peu partout à l'Est, en Bulgarie (parti Ataka qui soutient la coalition au pouvoir), en Hongrie (parti Fidesz dont Viktor Orban, l'actuel premier ministre, est le président et le parti Jobbik, ouvertement fasciste), en Roumanie (PLM) et qui accentuent encore un peu plus les discriminations dont ces populations sont depuis la chute du communisme victimes.

Ces familles qui hantent nos rues sont, d'abord, victimes de la xénophobie qui les condamnent à une extrême pauvreté dans leur pays d'origine. Il y a moins un "problème rom" qu'un problème de transition démocratique dans les anciens pays de l'Est. C'est cela que les institutions européennes doivent viser en priorité, sachant que tous ces mouvements ont accédé au pouvoir ou en sont proches grâce à des électeurs qui vivent mal la transition démocratique.

lundi, août 06, 2012

Zones de sécurité prioritaires

Le gouvernement vient donc d'annoncer la création de 15 zones de sécurité prioritaires, ce qui nous donne droit à un de ces acronymes qu'affectionne l'administration : les ZSP. C'est dans ces zones que seront, semble-t-il, affectés les policiers recrutés en sus des effectifs actuels. S'il ne s'agissait que de cela, ce projet n'aurait guère de chance de donner des résultats : ce n'est pas en ajoutant des gendarmes et des policiers qu'on améliore forcément la sécurité, quoique disent les syndicats. C'est en travaillant mieux. Il semble, à lire les premières informations données dans la presse que ce pourrait être le cas. J'en ai retenu trois éléments qui me paraissent aller dans le bon sens :

- la recherche d'une meilleure coordination entre police, justice et acteurs travaillant à la réinsertion, ce qui est la meilleure façon d'intégrer dans le travail sur la sécurité le traitement de la délinquance sur la durée : inutile que la police arrête des délinquants si la justice ne peut pas les juger dans des délais raisonnables, inutile de condamner à des peines trop lourdes des primo-délinquants s'il apparait qu'ils risquent de faire l'apprentissage du crime en prison, inutile de libérer des délinquants si rien n'est prévu pour les accompagner dans le retour à la vie civile…
- la concentration sur un nombre limité d'objectifs dans chaque zone (le trafic de stupéfiants, les cambriolages, les violences faites aux personnes…), ce qui devrait favoriser la spécialisation des forces de police et donc une plus grande efficacité,
- le choix de zones très variées (zones urbaines en périphérie des grandes villes mais aussi zones semi urbanisées) qui indiquent que l'on a une vue globale de la sécurité et que l'on prend en compte des situations très variées.

Il faudrait pour que ces mesures soient efficaces deux autres éléments : un suivi régulier des autorités politiques et des experts qui permettent d'identifier les solutions les plus efficaces et une culture de la diffusion des meilleures pratiques au sein des administrations concernées. 

dimanche, août 05, 2012

Patience, patience…

La presse (et sans doute bien d'autres à gauche) commence à s'impatienter, à trouver que tout ne va pas assez vite, que les réformes se font attendre. Ce à quoi, les socialistes répondent que rien ne sert de courir, que mieux vaut prendre son temps si l'on veut modifier effectivement les choses. Tout le contraire, en somme, de Nicolas Sarkozy qui multipliait les initiatives qui se perdaient rapidement dans les sables.

Phénomène de déperdition que la commission des finances de l'Assemblée nationale a évalué dans le rapport dont parle le Monde dan son édition du 5/8/2012 : "S'intéressant à l'application des 54 dispositions fiscales récentes adoptées en décembre 2011 dans le budget pour 2012, les députés notent que 40 sont " pleinement en application au 1er juin 2012 ", donc qu'un quart... ne l'est pas encore. Sur un panel plus large de textes - d'une part, les dispositions fiscales adoptées dans les lois de finances promulguées avant le 1er janvier 2011, mais qui, à la date du 1er juin 2011, n'avaient pas encore fait l'objet des textes d'application nécessaires, d'autre part, sur les dispositions fiscales contenues dans la loi de finances initiale pour 2012 et dans les lois de finances rectificatives pour 2011 et 2012, soit 249 articles de 17 lois - le ratio est à peu près équivalent."

Ce qui me fait penser à cette remarque de Bergson dans un texte sur Thibaudet : "A quel signe se reconnait la grandeur d'un homme d'Etat? En toute autre affaire, on peut apprécier directement l'homme, ou l'oeuvre, ou les deux ensemble, et dès lors porter un jugement. Mais dans le cas de l'homme d'Etat, c'est la durée de son oeuvre qui lui confère rétroactivement sa grandeur : de deux grands ministres ou soi-disant tels, l'un n'était pas supérieur à l'autre et ne l'est pas encore : il le sera, et, à partir de ce moment, l'aura été. Jusque là, leurs mérites respectifs ne sont pas plus dans le passé que dans l'avenir, et l'on ne peut guère que parier que pour l'un d'eux." (in Quelques mots sur Thibaudet, critique et philosophe, NRF, 1/07/1936).

Soit, soit… reste que l'impatience se muera en déception si toutes ces commissions ne servent qu'à enterrer les dossiers. On devrait vite le savoir.