On pourrait dire "Royal" et "Nicolas", mais ce n'est pas ce que l'on fait, on dit "Ségolène" et "Sarko" ou "Sarkozy". La manière dont on nomme les politiques n'est pas indifférente. II y a ceux dont on détourne le nom : lorsque l'on entendait prononcer "Mitrand" au lieu de "Mitterrand", on savait que l'on avait immédiatement affaire à un homme de droite plutôt à la droite de la droite. Il y a ceux dont le nom devient support d'un substantif, comme De Gaulle, qui a donné naissance au gaullisme ou Giscard au giscardisme. On remarquera, à propos de Giscard, qu'un peuple républlicain n'a pas manqué de l'amputer de sa particule (volée, volée ou plutôt achetée, dit-on, ce qui a sans doute contribué en son temps à son succès : il en a toute l'apparence, mais il n'en est pas vraiment, je veux dire de l'aristocratie).
Mais revenons à Ségolène et à Sarkozy. On dit parfois "Ségo" pour Ségolène, abréviation qui tient à la longueur de son prénom et à l'influence de "Sarko". Ces deux diminutifs riment, ce qui fait sourire. Mais pourquoi l'une a-t-elle droit à son prénom et l'autre à son patronyme?
On peut imaginer plusieurs hypothèses :
- la première vaguement psyschanalytique. Ségolène Royale a beaucoup raconté sa jeunesse et son père militaire brutal et hyper-viril. Barrer son patronyme pourrait être une manière de la venger. Nous sommes solidaires de la jeune fille en souffrance et nous le marquons en l'amputant du nom de son père ;
- autre hypothèse vaguement psychanalytique : nous sommes républicains et un peu gênés par ce patronyme qui nous rappelle un cadavre dans le placard de notre histoire. Non que nous regrettions le roi, mais la guillotine… bof, bof…
Des féministes pur(e)s et dur(e)s pourraient être choqué(e)s et y voir une forme discrète de discrimination. Auraient-(ils)elles tort? Je n'en suis pas certain. On peut analyser cette familiarité comme une manière ne pas vraiment prendre au sérieux cette femme candidate (celle-ci ou n'importe quelle autre). Mais si l'on s'en tient à cette ligne de réflexion, il faut se demander si toutes les femmes sont traitées de la même manière.
Je ne me souviens pas qu'on ait, à droite, parlé de Simone, Michèle ou Françoise (pour cette dernière, on a souvent entendu dire "la Panafieu" ce qui suggérait des informations particulières et pas forcément aimables (ni avérées), sur la vie sentimentale de la dame). A gauche, c'est un peu plus compliqué. Personne n'a jamais appelé Guigou "Elizabeth", il est vrai qu'elle est plutôt du genre glacial, mais j'ai entendu à plusieurs reprises appeler Martine Aubry, "Martine", sans que ce soit un signe de familiarité. Et comme personne ne l'a jamais accusée de manquer d'intelligence ou de compétence ni d'être excessivement féminine, c'était une manière particulièrement perverse de la dégommer.
Pour Ségolène Royal, les choses sont plus subtiles. Les socialistes, lors de leur campagne interne, se sont appelés par leur prénom, une manière comme une autre de dédramatiser leur concurrence, de lisser les oppositions. Laurent et Dominique ont débattu avec Ségolène, ce qui lui a donné un air de familiarité qui n'était pas évident. Mais qui, dans le public, dit Laurent ou Dominique? Le seul homme politique qui ait, me semble-t-il, un prénom est François Hollande, mais peut-être est-ce parce que nous nous glissons dans la chambre du couple qu'il forme avec "la Royal" (jamais entendu, il est vrai que toute belle qu'elle soit, elle n'inspire guère la gaudriole) et que nous nous mettons à lui parler comme Ségolène fait (enfin, j'espère!).
On peut d'ailleurs penser que l'on dit d'autant plus volontiers Ségolène qu'il est toujours un peu étrange d'entendre Hollande (vous remarquerez que le prénom manque) dire "Ségolène Royal". Imagine-t-on le ridicule d'un Jacques Chirac parlant de sa femme et disant : "Madame Chirac"? Même Georges Marchais s'en était gardé lors de ce bel épisode où il avait commandé à son épouse, dont j'ai oublié le prénom, de faire les valises et de rentrer à Paris (merveille de l'internet, je fais sur Google "Marchais + valises" et je trouve le prénom : son épouse s'appelle Liliane, c'était en 1980 et il s'agissait du programme commun).
Ce prénom rare et un peu précieux (vous connaissez beaucoup de femmes de 50 ans qui s'appellent Ségolène? les parents qui donnaient ce prénom à leur fille dans les années 50 se comptaient sur les doigts d'une ou deux mains comme en témoignent ces statistiques) la protège de trop de familiarité : Martine, Catherine ou Geneviève auraient été moins efficaces. Merci papa Royal!
Mais est-ce que cette familiarité va l'aider dans la campagne présidentielle? Sans doute. Cela devrait l'aider à adoucir l'image un peu rude qu'elle donne volontiers d'elle-même et ringardiser un peu plus un Sarkozy dont l'image ressemble de plus en plus à celle de cet "agité du bocal" dont parlait dans un tout autre contexte Céline (Louis-Ferdinand).
Avoir des opinions est l'un des éléments du bien-être, affirmait il y a une quinzaine d'années, l'économiste A.O.Hirshman. Les blogs sont une bonne manière d'afficher ses opinions mais aussi, et peut-être même surtout, de les construire. C'est ce qui m'a donné envie de tenir celui-ci
jeudi, novembre 30, 2006
mercredi, novembre 29, 2006
Injustices sociales vs pathologies sociales
La Découverte vient de publier un recueil d'articles d'Axel Honneth, sociologue allemand de l'école de Francfort que l'on connaît pour ses travaux sur la reconnaissance : La société du mépris. Ce recueil est passionnant et, malheureusement, comme c'est de plus en plus souvent le cas, abominablement édité (un exemple entre dix : un des papiers d'Honneth est une réponse aux critiques faites à la Dialectique de la raison d'Horkheimer et Adorno ; à aucun moment, l'éditeur ne prend la peine de donner le nom des deux auteurs de ce livre, c'est au lecteur de chercher ou de retrouver, s'il a un peu de culture philosophique, dans sa mémoire).
Mais revenons à l'essentiel : au contenu de ce recueil. On y trouve beaucoup de choses intéressantes et notamment une opposition, utile dans les débats sur l'équité et la société juste, entre injustices sociales et pathologies sociales : des situations justes peuvent être insupportables.
C'est lorsque l'on regarde le monde social avec d'autres lunettes, que l'on peut voir, au delà des injustices que le réformiste corrige avec plus ou moins de bonheur, de véritables pathologies sociales.
C'est une manière de réintroduire dans le jeu politique l'opposition entre réformisme et révolution (ou, si l'on préfère, critique radicale de la société) qui s'était effacée ces dernières années, le mot révolution s'étant vidé de son sens. Mais c'est aussi une façon de légitimer dans le débat public d'autres manières de s'exprimer en politique. Aux experts qui argumentent de manière rationnelle et s'attachent à corriger les injustices que l'on sait mesurer, Honneth oppose ceux qui utilisent la parabole, la métaphore, la rhétorique pour rendre visible l'inacceptable que les acteurs ne voient pas toujours (d'où la figure de l'esclave heureux que l'on rencontre dans ce livre). C'est de cette manière, en effet, que l'on peut espérer modifier les normes dans une société.
Au coeur de cette distinction, il y a, explique Honneth un glissement dans les préoccupations de la philosophie politique : "il ne s'agit plus, écrit-il à propos de Hobbes qui aurait été l'un des premiers à initier ce glissement, de savoir comment une communauté peut garantir à ses membres une vie qui soit à la fois bonne et juste, tout ce qui le préoccupe c'est de savoir comment elle peut être en mesure de construire un ordre qui recoive un assentiment général. (…) La philosophie n'est censée apporter de réponse qu'aux problèmes relatifs à l'institution de rapports sociaux justes ; quant aux conditions qui garantissent une vie bonne, elles sont si peu accessibles à une définition générale qu'elles doivent rester en dehors du cadre de la philosophie."
Cette opposition entre injustices et pathologies sociales parait utile et pourrait bien demain nourrir les débats au sein de la gauche entre réformistes et radicaux.
Mais revenons à l'essentiel : au contenu de ce recueil. On y trouve beaucoup de choses intéressantes et notamment une opposition, utile dans les débats sur l'équité et la société juste, entre injustices sociales et pathologies sociales : des situations justes peuvent être insupportables.
C'est lorsque l'on regarde le monde social avec d'autres lunettes, que l'on peut voir, au delà des injustices que le réformiste corrige avec plus ou moins de bonheur, de véritables pathologies sociales.
C'est une manière de réintroduire dans le jeu politique l'opposition entre réformisme et révolution (ou, si l'on préfère, critique radicale de la société) qui s'était effacée ces dernières années, le mot révolution s'étant vidé de son sens. Mais c'est aussi une façon de légitimer dans le débat public d'autres manières de s'exprimer en politique. Aux experts qui argumentent de manière rationnelle et s'attachent à corriger les injustices que l'on sait mesurer, Honneth oppose ceux qui utilisent la parabole, la métaphore, la rhétorique pour rendre visible l'inacceptable que les acteurs ne voient pas toujours (d'où la figure de l'esclave heureux que l'on rencontre dans ce livre). C'est de cette manière, en effet, que l'on peut espérer modifier les normes dans une société.
Au coeur de cette distinction, il y a, explique Honneth un glissement dans les préoccupations de la philosophie politique : "il ne s'agit plus, écrit-il à propos de Hobbes qui aurait été l'un des premiers à initier ce glissement, de savoir comment une communauté peut garantir à ses membres une vie qui soit à la fois bonne et juste, tout ce qui le préoccupe c'est de savoir comment elle peut être en mesure de construire un ordre qui recoive un assentiment général. (…) La philosophie n'est censée apporter de réponse qu'aux problèmes relatifs à l'institution de rapports sociaux justes ; quant aux conditions qui garantissent une vie bonne, elles sont si peu accessibles à une définition générale qu'elles doivent rester en dehors du cadre de la philosophie."
Cette opposition entre injustices et pathologies sociales parait utile et pourrait bien demain nourrir les débats au sein de la gauche entre réformistes et radicaux.
lundi, novembre 27, 2006
Revoilà Le Pen…
Est-ce parce qu'il vieillit, que nous l'avons tellement vu que nous nous nous y sommes habitués, mais Le Pen fait moins peur. Il était hier chez Serge Moati qui l'a accueilli on ne peut plus courtoisement et l'a laissé développer son programme, enfin les quelques points qui lui en tiennent lieu. Je dis quelques, mais il n'en a développé que trois :
- l'immigration zéro (pas tout à fait zéro, a-t-il dit, mais presque), ce qui est depuis toujours son fonds de commerce,
- le retour des frontières et des barrières douanières, en un mot du protectionisme, thème qu'il pargage avec l'extrême-gauche (qui ferait bien de s'interroger sur cet étrange cousinage),
- l'augmentation massive du budget de la Défense nationale (qu'il est le seul à proposer).
Tout cela fait effectivement système et l'on aurait aimé que ses contradicteurs l'interrogent sur l'étrange collusion des frontières et de la Défense. Reconstruire les frontières et augmenter le budget militaire, n'est-ce pas annoncer le retour des conflits armés? Historiquement, reflus du libre-échange et conflits armés sont en général allés de pair. Est-ce bien cela que veulent les Français?
Quant au racisme, on en a évidemment parlé, mais, comme trop souvent, de manière maladroite, donnant à Le Pen la possibilité de rappeler qu'il a fait élire noirs et beurs dans son mouvement et qu'il n'est pas impossible qu'il devienne un jour l'ami de Dieudonné.
Sans doute conviendrait-il de distinguer son racisme populaire du racisme plus "sophistiqué" de l'extrême-droite d'avant-guerre qui avait théorisé l'inégalité des races. A ne pas faire de distinction, on risque simplement que ses électeurs, et beaucoup de Français avec, haussent les épaules : "si c'est cela le racisme… alors il n'y pas de quoi fouetter un chat." (la même chose vaut d'ailleurs pour Georges Frêche dont les propos indignes auraient dû être dénoncés tout autrement. On aurait pu, par exemple, se demander pourquoi règne dans notre société une division du travail qui met les noirs sur les terrains de foot et les blancs dans les conseils d'administration…).
Le Pen n'a pas perdu ses griffes comme on l'a vu dans le débat, mais plutôt que de l'attaquer sur son racisme et ses propos sur les fours crématoires, que tout le monde connaît, ses adversaires feraient mieux de l'interpeller sur son programme. Il serait intéressant de savoir, par exemple, en quoi consiste ce qu'il appelle la préférence nationale. Jusqu'où veut-il aller? Qui veut-il vraiment exclure? Des questions précises seraient certainement la meilleure manière de le déstabiliser, de montrer le vide ou la violence (ou la sottise) de ses propositions.
Ce serait sans doute la meilleure manière de dégonfler une baudruche qui m'a paru, hier soir, et à l'encontre de ce que disait un sondage publié la veille par Le Monde, en petite forme sinon en perte de vitesse. Ce serait certainement la meilleure manière de l'amener à révéler les pans les moins reluisants de son programme.
- l'immigration zéro (pas tout à fait zéro, a-t-il dit, mais presque), ce qui est depuis toujours son fonds de commerce,
- le retour des frontières et des barrières douanières, en un mot du protectionisme, thème qu'il pargage avec l'extrême-gauche (qui ferait bien de s'interroger sur cet étrange cousinage),
- l'augmentation massive du budget de la Défense nationale (qu'il est le seul à proposer).
Tout cela fait effectivement système et l'on aurait aimé que ses contradicteurs l'interrogent sur l'étrange collusion des frontières et de la Défense. Reconstruire les frontières et augmenter le budget militaire, n'est-ce pas annoncer le retour des conflits armés? Historiquement, reflus du libre-échange et conflits armés sont en général allés de pair. Est-ce bien cela que veulent les Français?
Quant au racisme, on en a évidemment parlé, mais, comme trop souvent, de manière maladroite, donnant à Le Pen la possibilité de rappeler qu'il a fait élire noirs et beurs dans son mouvement et qu'il n'est pas impossible qu'il devienne un jour l'ami de Dieudonné.
Sans doute conviendrait-il de distinguer son racisme populaire du racisme plus "sophistiqué" de l'extrême-droite d'avant-guerre qui avait théorisé l'inégalité des races. A ne pas faire de distinction, on risque simplement que ses électeurs, et beaucoup de Français avec, haussent les épaules : "si c'est cela le racisme… alors il n'y pas de quoi fouetter un chat." (la même chose vaut d'ailleurs pour Georges Frêche dont les propos indignes auraient dû être dénoncés tout autrement. On aurait pu, par exemple, se demander pourquoi règne dans notre société une division du travail qui met les noirs sur les terrains de foot et les blancs dans les conseils d'administration…).
Le Pen n'a pas perdu ses griffes comme on l'a vu dans le débat, mais plutôt que de l'attaquer sur son racisme et ses propos sur les fours crématoires, que tout le monde connaît, ses adversaires feraient mieux de l'interpeller sur son programme. Il serait intéressant de savoir, par exemple, en quoi consiste ce qu'il appelle la préférence nationale. Jusqu'où veut-il aller? Qui veut-il vraiment exclure? Des questions précises seraient certainement la meilleure manière de le déstabiliser, de montrer le vide ou la violence (ou la sottise) de ses propositions.
Ce serait sans doute la meilleure manière de dégonfler une baudruche qui m'a paru, hier soir, et à l'encontre de ce que disait un sondage publié la veille par Le Monde, en petite forme sinon en perte de vitesse. Ce serait certainement la meilleure manière de l'amener à révéler les pans les moins reluisants de son programme.
Le retour de Saddam Hussein
Si l'on veut se faire une idée du désarroi dans lequel se trouve l'opinion américaine, il suffit de lire la presse d'outre-Atlantique. On y trouve des perles qui font plus que sourire. Je pense au papier qu'a publié ce matin Jonathan Chait dans le Los Angeles Times. Chait est un de ces éditorialistes qui écrivent pour toute une série de journaux (dans son cas, The New York Times, le Washington Post, le Wall Street Journal, Slate, Time, American Prospect) et qui expriment autant qu'ils font l'opinion.
Dans ce papier au titre provocateur : Bring back Saddam Hussein, il propose tout simplement de ramener au pouvoir en Irak Saddam Hussein. L'argument est d'une simplicité angélique : lui, au moins, avait su assurer la paix civile et mettre sous contrôle les affrontements en sunnites et chiites.
Il faut que l'opinion américaine soit déboussolée pour qu'un journaliste plutôt sérieux écrive cela et pour qu'un journal plutôt raisonnable le publie…
Dans ce papier au titre provocateur : Bring back Saddam Hussein, il propose tout simplement de ramener au pouvoir en Irak Saddam Hussein. L'argument est d'une simplicité angélique : lui, au moins, avait su assurer la paix civile et mettre sous contrôle les affrontements en sunnites et chiites.
Il faut que l'opinion américaine soit déboussolée pour qu'un journaliste plutôt sérieux écrive cela et pour qu'un journal plutôt raisonnable le publie…
lundi, novembre 20, 2006
Ségolène, les profs et les 35 heures…
Il faut regarder la vidéo vue par plusieurs centaines de milliers de personnes dans laquelle Ségolène Royal parle des 35 heures des profs, il faut voir les sourires narquois de ses voisins, son air calme et déterminé pour comprendre sa popularité et sa victoire. Quel parent (de gauche, de droite, du centre…) peut aller contre ce qu'elle dit? Ce qui la distingue de ses voisins, et de beaucoup de la classe politique est qu'elle dit des choses de bon sens, que beaucoup ont pensé et qu'elle le fait sans se soucier des calculs politiques (les syndicats sont contre, soit, hé bien signons un pacte avec eux pour pouvoir agir…).
Paradoxalement, je pense que cette vidéo clandestine mais largement diffusée l'a doublement servie :
- en montrant qu'elle avait des idées et qu'elle n'hésitait pas à les afficher même devant un public timide, ironique,
- en confirmant qu'elle ne participait pas au jeu politicien et que les politiques et les journalistes faisaient souvent beaucoup de bruit pour pas grand chose.
Paradoxalement, je pense que cette vidéo clandestine mais largement diffusée l'a doublement servie :
- en montrant qu'elle avait des idées et qu'elle n'hésitait pas à les afficher même devant un public timide, ironique,
- en confirmant qu'elle ne participait pas au jeu politicien et que les politiques et les journalistes faisaient souvent beaucoup de bruit pour pas grand chose.
jeudi, novembre 16, 2006
Ségolène Royal, les enseignants et les 35 heures
La diffusion sur internet d'une vidéo montrant Ségolène Royal défendant les 35 heures pour les enseignants a certainement été organisée pour le porter tort. On ne sait par qui, même si certainns soupçonnent l'UMP. Mais peu importe. Il ne faudrait pas que ce petit mystère interdise de s'interroger sur la proposition.
Il y a quelques jours, le Monde indiquait que tous les acteurs de l'Education à l'exception des syndicats d'enseignant, tous les ministres en avaient révé. Et l'on comprend pourquoi lorsque l'on apprend que le chiffre d'affaires des petits cours représente 900M€ par an, soit 150€ par lycéen, sachant naturellement que l'enseignement à domicile concerne plus les familles aisées que les familles modestes. Ces dépenses progresseraient de 5 à 10% par an d'après cette note d'Emeric Burin des Roziers sur Débat 2007.
Tout cela devrait inviter à prendre au sérieux la proposition de Ségolène Royal. S'il est vrai qu'elle parait d'une mise en oeuvre difficile, elle offre une piste de réflexion. Pourquoi, par exemple, ne pas demander aux enseignants qui le souhaitent de consacrer quelques heures de plus à des enseignements en petits groupes pour le soutien des élèves en difficulté contre un complément de rémunération?
Il y a quelques jours, le Monde indiquait que tous les acteurs de l'Education à l'exception des syndicats d'enseignant, tous les ministres en avaient révé. Et l'on comprend pourquoi lorsque l'on apprend que le chiffre d'affaires des petits cours représente 900M€ par an, soit 150€ par lycéen, sachant naturellement que l'enseignement à domicile concerne plus les familles aisées que les familles modestes. Ces dépenses progresseraient de 5 à 10% par an d'après cette note d'Emeric Burin des Roziers sur Débat 2007.
Tout cela devrait inviter à prendre au sérieux la proposition de Ségolène Royal. S'il est vrai qu'elle parait d'une mise en oeuvre difficile, elle offre une piste de réflexion. Pourquoi, par exemple, ne pas demander aux enseignants qui le souhaitent de consacrer quelques heures de plus à des enseignements en petits groupes pour le soutien des élèves en difficulté contre un complément de rémunération?
mardi, novembre 14, 2006
L'UMP n'est pas forcément sinistre
Si je vous parle de l'UMP et de son site, vous allez hausser les épaules… Et vous aurez… tort. Car l'UMP n'est pas forcément synonyme de Sarkozy. A preuve ce site que je viens de découvrir et que je vous recommande d'aller visiter. Vraiment… Vous n'êtes pas déjà parti? Faites vite. Si, si, je vous promets…
Mais après, revenez-moi…
Mais après, revenez-moi…
dimanche, novembre 12, 2006
Les jurys citoyens de Ségolène Royal et John Rawls
Les jurys citoyens de Ségolène Royal font couler beaucoup d'encre (par exemple ici). Ils suscitent en général beaucoup d'hostilité, mais on sent, même chez les plus critiques, l'intuition que derrière cette proposition, il y a une vraie question : les citoyens ne se sentent plus vraiment ou pas complètement représentés. Sans aller jusqu'à dire que notre démocratie est en crise, les symptomes d'un mal-être sont nombreux :
- la dispersion des voix lors du premier tour de la précédente élection présidentielle sur une myriade de petits candidats, l'importance des abstentions et le nombre élevé de gens qui ne sont pas inscrits sur les listes électorales indique que beaucoup ne se reconnaissent pas dans les candidats et dans leurs programmes,
- la crispation à l'égard de l'Europe que personne ne juge vraiment démocratique (pour avoir essayé il y a quelques années de le montrer dans un document qui m'avait été commandé par la Commission je peux témoigner qu'il faut beaucoup se creuser les méninges pour trouver les institutions européennes démocratiques au sens classique du mot) témoigne de l'exaspération de beaucoup à l'égard de ces systèmes où l'on se préoccupe moins des désirs des citoyens que des rapports de force entre groupes de pression et lobbies.
Notre politique se fait aujourd'hui au croisement de quatre sources :
- les sondages qui auscultent régulièrement l'opinion,
- les avis d'experts,
- les élections,
- l'action de communication des lobbies et groupes de pression.
En introduisant des jurys citoyens, Ségolène Royal en propose une nouvelle. Ces jurys seraient, nous dit-elle, composés de gens tirés au sort (un peu à la manière des jurys d'assise ou des responsables de la cité dans l'antiquité grecque). Elle a précisé que les jurys n'étaient pas forcément là pour condamner (elle a, à ce propos, fait allusion aux jurys littéraires). On peut compléter :
- ils ne seraient pas représentatifs de l'opinion comme le sont les sondages,
- ils n'auraient pas la compétence des experts,
- ils n'auraient pas la légitimité des élus,
- ils n'auraient pas les intérêts des lobbies.
Est-ce que cela les déconsidère? pas forcément. Ces jurys me rappellent ces assemblées réunies sous un voile d'ignorance qu'imaginait John Rawls pour créer une société juste. Des gens qui ne sachant pas ce que serait leur place dans la société qu'ils concevaient ne pouvaient que concevoir une société juste. Utopie? Sans doute, mais qui met le doigt là où cela fait mal : le sentiment d'impuissance et d'injustice de beaucoup de citoyens qui ont le sentiment que la politique se fait en dehors d'eux et que les décisions prises le sont sans souci de la justice.
- la dispersion des voix lors du premier tour de la précédente élection présidentielle sur une myriade de petits candidats, l'importance des abstentions et le nombre élevé de gens qui ne sont pas inscrits sur les listes électorales indique que beaucoup ne se reconnaissent pas dans les candidats et dans leurs programmes,
- la crispation à l'égard de l'Europe que personne ne juge vraiment démocratique (pour avoir essayé il y a quelques années de le montrer dans un document qui m'avait été commandé par la Commission je peux témoigner qu'il faut beaucoup se creuser les méninges pour trouver les institutions européennes démocratiques au sens classique du mot) témoigne de l'exaspération de beaucoup à l'égard de ces systèmes où l'on se préoccupe moins des désirs des citoyens que des rapports de force entre groupes de pression et lobbies.
Notre politique se fait aujourd'hui au croisement de quatre sources :
- les sondages qui auscultent régulièrement l'opinion,
- les avis d'experts,
- les élections,
- l'action de communication des lobbies et groupes de pression.
En introduisant des jurys citoyens, Ségolène Royal en propose une nouvelle. Ces jurys seraient, nous dit-elle, composés de gens tirés au sort (un peu à la manière des jurys d'assise ou des responsables de la cité dans l'antiquité grecque). Elle a précisé que les jurys n'étaient pas forcément là pour condamner (elle a, à ce propos, fait allusion aux jurys littéraires). On peut compléter :
- ils ne seraient pas représentatifs de l'opinion comme le sont les sondages,
- ils n'auraient pas la compétence des experts,
- ils n'auraient pas la légitimité des élus,
- ils n'auraient pas les intérêts des lobbies.
Est-ce que cela les déconsidère? pas forcément. Ces jurys me rappellent ces assemblées réunies sous un voile d'ignorance qu'imaginait John Rawls pour créer une société juste. Des gens qui ne sachant pas ce que serait leur place dans la société qu'ils concevaient ne pouvaient que concevoir une société juste. Utopie? Sans doute, mais qui met le doigt là où cela fait mal : le sentiment d'impuissance et d'injustice de beaucoup de citoyens qui ont le sentiment que la politique se fait en dehors d'eux et que les décisions prises le sont sans souci de la justice.
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