Cette campagne électorale sera la première à laquelle la blogosphère va participer massivement (voir là-dessus, l'enquête de l'observatoire de la netcampagne qu'a mis en place l'Ifop qui relativise, 10% seulement des internautes visitent les sites politiques, mais estime tout de même que cela représente de 2 à 3 millions de personnes). Elle a commencé de le faire à sa manière qui n'est pas celle des médias classiques dont le rôle est amené à évoluer. On peut dores et déjà faire quelques remarques :
- la communication à l'ancienne, telle que la pratique Nicolas Sarkozy sur son blog n'est pas satisfaisante : les photos trop léchées (trop visiblement retouchées), les réponses "spontanées" au micro-trottoirs, tout cela sonne creux et faux : la blogosphère a son style, ce n'est pas celui des plaquettes politiques traditionnelles ;
- les rumeurs ne circulent plus tout à fait de la même manière : elles sortent plus rapidement de la semi-clandestinité, ce qui force les candidats à y répondre plus vite (exemple, la polémique sur la feuille d'impôts des Hollande). Elles gagnent à être écrites et diffusées largement une sorte d'autorité qui permet de les citer dans les grands médias et, ainsi, de les officialiser. Si la rumeur n'avait été que de bouche à oreille, le député UMP Jacques Godfrain n'aurait certainement pas pris le risque de la révéler dans une interview à la Dépèche du Midi (ne serait-ce que parce que des poursuites en diffamation perdent beaucoup de leur sens lorsqu'une information a circulé sur de nombreux sites) ;
- le partage entre le privé et le public s'estompe. On l'a vu tout récemment avec l'exécution de Saddam Hussein. Cette exécution qui aurait du être privée a fait le tour du monde grâce à un téléphone portable et à internet. Les propos que Ségolène Royal avait tenu sur le temps de travail des enseignants avait de la même manière quitté l'intimité d'une réunion de militants pour se retrouver dans l'espace public ;
- les grands médias ont emboité le pas à la blogosphère et bien loin de la combattre ou d'en réduire l'influence, ils mettent leurs moyens à sa disposition (papiers de la presse écrite qui citent des blogs, appel des grandes chaînes de télévision aux images des internautes, comme France 2 qui vient de créer un espace dédié à la campagne présidentielle sur GoogleVidéo) ;
- de nouveaux acteurs s'imposent dans le débat public : les experts, économistes, sociologues, juristes dont les opinions "éclairées" sortent de la semi-clandestinité pour être affichées en plein jour. Le projet de droit au logement opposable a été une des premières mesures gouvernementales à faire les frais de cette montée en puissance des experts : en quelques jours, les juristes qui connaissent le dossier on décortiqué, critiqué le projet gouvernemental et fait connaître leur scepticisme. Sans la blogosphère ces réflexions seraient restées éparpillées, réservées aux proches de ces juristes.
Tout cela suggère un contrôle beaucoup plus serré de l'opinion sur les candidats, mais également des mécanismes nouveaux de formation de l'opinion. Les politiques n'ont plus l'exclusivité des propositions et des discours politiques. La société civile se réapproprie une partie de ces discours.
Autant de défis nouveaux pour les candidats. Ségolène Royal sans doute trouvé le mot juste en parlant de transparence et en demandant à Nicolas Sarkozy de publier également ses feuilles d'impôt. Mais la campagne ne se joue pas que dans la blogosphère comme le montre la montée en puissance de Sarkozy après sa grand-messe réussie du 14 janvier.
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