On ne peut plus, depuis quelques jours, ouvrir un journal, écouter une radio ou une télévision sans tomber sur un bilan de la première année Sarkozy. Bilan presque toujours sévère qui reprend, pour expliquer ces 12 mois chaotiques, trois thèmes :
- la vie privée et le coté bling-bling du Président,
- le pouvoir d'achat et l'incapacité du gouvernement à améliorer la situation des Français, même s'il n'est pas responsable du retour de l'inflation, de la montée des prix du pétrole et de l'euro fort,
- l'illisibilité de la politique menée.
Ce dernier thème, sans doute le plus intéressant, est décliné de plusieurs manières :
- réformes avortées ou incomplètes (comme la sélection en fin d'études supérieures quand il aurait fallu, disent ses partisans, l'introduire au début…),
- couacs multiples qui donnent le sentiment d'un navire sans pilote,
- trop grand nombre de "réformes" qui interdit d'y comprendre quelque chose…
J'ajouterai volontiers à cette liste : un mauvais gouvernement. Si les Français sont si déçus, s'ils ont le sentiment d'une telle illisibilité, c'est peut-être tout simplement qu'ils ont le sentiment que l'équipe en place travaille mal, prend des mesures inopérante et se met en permanence en situation de se contredire. Je prendrai deux exemples rarement soulignés de ce mauvais gouvernement : l'immigration et les retraites.
Commençons par l'immigration. Le gouvernement a fait voter, il y a quelques mois, un texte très restrictif sur l'immigration qui prévoit cependant dans un de ses articles, la possibilité pour un employeur qui ne trouve pas de main d'oeuvre d'aller la chercher à l'étranger. Le texte est timide, discret, mais il a permis à des immigrés sans papiers qui travaillent, paient des cotisations sociales et, éventuellement, des impôts, de réclamer leur régularisation et de le faire avec le soutien de leur patron. On voulait réduire l'immigration, fermer nos frontières, et l'on obtient tout le contraire : on prouve que notre économie a besoin d'immigrés, par dizaines voire par centaines de milliers. La politique de la régularisation au cas par cas nous promet que cette affaire fera l'actualité pendant des mois encore.
Voyons, maintenant les retraites. Dans un des premiers textes qu'il fait voter le gouvernement organise la détaxation des heures supplémentaires dorénavant libres de toute cotisations sociales. Coût pour les organismes sociaux, tel que le calcule Thomas Piketty dans un article de Libération, 6,5 milliards d'€. Coût pour les seules caisses de retraites : 2,5 milliards d'€. Quelques mois plus tard, le gouvernement veut allonger la durée des cotisations, les faire passer de 40 à 41 ans. Recettes pour les caisses de retraites : 2,5 milliards d'€… Etait-il vraiment nécessaire de prendre une mesure qui va appauvrir à peu près tous les salariés pour inciter (sans succès, mais c'est une autre histoire), les entreprises à faire plus d'heures supplémentaires?
Il est dans les sociétés complexes, comme les nôtres, difficile de gouverner, d'éviter les effets pervers, les contradictions, mais on a le sentiment que ce gouvernement qui confond réformes et vote de textes au Parlement, n'a pas pris la mesure de cette complexité.
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