Avoir des opinions est l'un des éléments du bien-être, affirmait il y a une quinzaine d'années, l'économiste A.O.Hirshman. Les blogs sont une bonne manière d'afficher ses opinions mais aussi, et peut-être même surtout, de les construire. C'est ce qui m'a donné envie de tenir celui-ci
mercredi, janvier 30, 2008
Une photo de Carla Bruni vaut 500 000€
Comment éviter demain la confusion des genres et l'exploitation de l'image de la compagne du Président (et donc, indirectement, la sienne) dans des campagnes publicitaires? comment échapper aux soupçons? En demandant à Madame Bruni de ne plus faire de publicité, de chansons? C'est un peu dur… et pourtant.
jeudi, janvier 24, 2008
Sarkozy = Pétain?
J'imagine qu'il ne s'agit que d'un geste d'intimidation lancé à l'égard d'un contestataire qui dérape, mais ne serait-il pas temps de supprimer cette notion même d'outrage au chef de l'Etat qui ne grandit jamais ceux qui l'utilisent? Lorsque l'on parle de De Gaulle et de sa grandeur, je me souviens toujours de ce jeune homme condamné à quelques jours de prison dans les années 60 pour avoir écrit sur un mur "De Gaulle, salaud" et je ne peux m'empêcher de penser que cette condamnation insignifiante (encore que…) met une ombre déplaisante sur le"grand homme".
mercredi, janvier 23, 2008
Bernard Lavilliers pris la main dans le sac
- que Claude Roy n'est pas si oublié que cela (enfin, qu'il a encore des lecteurs prêts à prendre la plume pour défendre sa mémoire),
- que le "communiste" Lavilliers a de nombreux amateurs chez les lecteurs de ce journal que l'on imaginait plus conservateurs (il est vrai qu'aimer les chansons de Lavilliers peut passer pour un peu "vieillot", disons, pour une manière de préférer les années 70 aux années 2000),
- qu'il n'en est pas à son premier couper-coller un peu audacieux,
- que, grâce à internet, ce journal est lu au Québec,
- et, enfin, que beaucoup de lecteurs ont appris à utiliser Google pour retrouver les "inspirations".
Impôts "invisibles"
Régulièrement, on nous annonce la création de nouvelles taxes pour financer des programmes particuliers :
- il y avait eu la taxe de 2% sur les ventes de poissons dans les grandes surfaces pour financer la filière pêche et moderniser la flotte,
- il y a eu, il y a quelques jours, l'annonce du financement de la suppression de la publicité sur les chaînes publiques par la création d'une taxe sur les ventes d'ordinateurs, de téléviseurs et les sociétés de téléphonie mobile,
- puis, une semaine plus tard, ce projet d'une taxe de 2 à 3 euros sur les chambres de palaces (bénéfice attendu : 50 millions d'euros par an) annoncé par la ministre de la culture.
Ces taxes ont quelques "avantages" : elles sont à peu près invisibles, elles épargnent les populations les plus remuantes (pas question de taxer les petits poissonniers ou les petits hôteliers) et laissent de marbre la plupart (qui ira se plaindre d'une augmentation du prix des chambres des palaces?).
Mais elles ont aussi de nombreux défauts. Pas besoin d'être un spécialiste pour voir que cela complique un système fiscal dont chacun nous dit qu'il gagnerait à être simplifié. Pas besoin, non plus, d'être grand calculateur pour voir que cela augmente ces prélèvements obligatoires dont tout le monde nous dit qu'il faudrait les diminuer et réduit, pour certaines au moins (le poisson, les téléviseurs…) ce pouvoir d'achat que l'on voudrait augmenter. Cela introduit, enfin, des distorsions de toutes sortes sur le marché au risque d'aller à l'encontre de politiques que l'on poursuit par ailleurs. Pour ne prendre que cet exemple : augmenter le prix du poisson frais, produit déjà cher, dans les grandes surfaces ne peut que favoriser le transfert vers les produits industriels que les nutritionnistes déconseillent si vivement (voir, hier, l'article du Monde : Manger sain, plus facile à dire qu'à faire).
mardi, janvier 22, 2008
David Martinon en candidat à Neuilly
lundi, janvier 21, 2008
Une défense des syndicats en riant
vendredi, janvier 18, 2008
Choqué
Mais pas besoin de Libé pour sentir que le vent tourne. On ne parle que de lui dans les dîners en ville. Lui, vous l’avez compris, c’est Nicolas Sarkozy. On en parle tant que des gens qui jamais ne vous auraient dit pour qui ils votaient, vous l’avouent, pour s’en excuser ou s’en laver les mains (“moi, Dieu merci, je n’y suis pour rien”). Autant dire que les procureurs sont plus nombreux que les avocats et qu’il ne trouve plus grâce auprès de grand monde. Les rares malheureux qui tentent de le défendre sont rapidement à court d’arguments tant le feu de leurs adversaires est nourri.
Mitterrand a été beaucoup haï en son temps, parce qu’il avait trahi sa classe sociale et qu’il s’était allié avec les communistes, je me demande si Sarkozy n’est pas en passe de l’être tout autant mais pour d’autres motifs.
La plupart des critiques que je rencontre dans des dîners parisiens disent que sa vie privée n’est pour pas grand chose dans ce rejet palpable, qu’elle ne les gêne pas, même s’ils regrettent son étalage. Disent-ils vrai? Je n’en suis pas certain.
Personnellement, je n’ai jamais partagé ses choix politiques, je crois qu’il se trompe lourdement sur de nombreux sujets, sur l’immigration, notamment, mais sa vie privée et l’indiscrétion dont il fait preuve me choquent au delà de ces différences d’opinion. Au risque de paraître abominablement conventionnel (ce que je suis sans doute) :
- je ne comprends pas qu’un Président nous parle en permanence de Dieu et de nos racines chrétiennes (ce n’est pas notre tradition, cela va contre notre identité nationale, si ce mot a un sens), je le comprends moins encore venant de quelqu’un qui a divorcé deux fois,
- je n’apprécie pas qu’un Président de la République affiche avec autant d’impertinence et d’ostentation ses amours : cela ne nous regarde tout simplement pas,
- je n’aime pas qu’un homme qui passe sa vie à exhorter les autres à travailler toujours plus vive aux frais d’industriels qui tirent parti de sa politique (qui sera le grand gagnant de la fin de la publicité sur les chaînes publiques, sinon Bolloré, propriétaire de Direct 8, une des chaînes de la TNT?),
- je déteste voir nos journaux, quotidiens et hebdomadaires, condamnés à faire la course avec Closer ou Point de vue - Images du Monde.
Conventionnel et ringard? Sans doute, mais suis-je le seul?
PS Je parlerai mardi prochain sur AligreFM de la fin de publicité sur les chaînes publiques. Le sujet est plus grave et plus inquiétant. L'émission sera mise en ligne mardi on pourra la consulter ici.
mardi, janvier 15, 2008
La hache californienne
"L'état de Californie, après des années de budgets excédentaire, se trouve actuellement en déficit. Assez lourdement du fait de moins bonnes rentrées fiscales en particulier. Sans rentrer dans le détail, ce qui est spectaculaire, ce sont les propositions du gouverneur, Arnold Scharzenegger :
- Coupe de plus de 4 milliards dans les budgets des écoles
- Coupe de plus d'un 1 milliards dans les budgets de la sécu locale, les aides sociales...
- Fermeture de 48 parcs
- Libération de 22.000 prisonniers pour faire de la place dans les prisons
- ...
Dans les premières réactions, ce qui frappe aussi c'est que pratiquement personne (cela a changé après) ne parlait de la possibilité d'augmenter les recettes, c'est-à-dire d'augmenter les impôts."
Comme le dit Malo, "A coté, Sarkozy parait un gauchiste utopique ! Ici, on prend la hache et on discute (un peu) après..." J'imagine que cela tient à ce que ceux qui votent (les classes moyennes) sont moins dépendantes de l'Etat que chez nous. Après tout, pourquoi se préoccuper du budget de l'éducation si l'on envoie ses enfants dans des établissements privés? Reste que Malo raconte qu'il est arrivé à San Francisco en plein blackout (2 millions de personnes privés d'électricité dans la baie). Il y a certainement un rapport de cause à effet.
vendredi, janvier 11, 2008
Sur l'antiparlementarisme d'Alain Badiou
Il n'y a pas que cela dans ce livre, il y a aussi le développement d'une thèse sur le pétainisme de Nicolas Sarkozy, thèse qu'ont retenue les quelques journalistes qui ont parlé de ce livre, et qui vaut mieux que ce que la formule peut avoir de provocant. Badiou explique clairement que Sarkozy n'est pas Pétain, mais qu'il relève de cette même tradition (ce n'est pas ainsi qu'il s'exprime puisqu'il parle de pétainisme transcendental) qui a commencé avec le retour, sous la Restauration, des immigrés dans les fourgons de l'ennemi, qui s'est poursuivie, sous la Commune, avec la reconquête du pouvoir par la bourgeoisie à l'ombre des armées ennemies, puis, en 1940, avec l'installation d'un Etat français à la botte de l'occupant allemand. Sarkozy s'inscrit, nous explique Badiou, dans cette tradition par son programme réactionnaire, sa volonté, propre à ses prédécesseurs, d'en finir avec la dernière révolution populaire (voir son discours hallucinant sur 1968) et par ses références permanentes à l'étranger, toujours présenté comme sachant mieux que nous faire ce qu'il faut. Tout cela se soutient, mais revenons au coeur de l'ouvrage : cette tentative, qui n'est pas inédite chez Badiou, de fonder un antiparlementarisme d'extrême-gauche.
L'antiparlementarisme n'est pas une nouveauté. Il est en général associé à l'extrême-droite qui l'a développé sous trois nuances que l'on connaît bien :
- la nuance royaliste : le lien entre le roi et le peuple est fondé sur un lien surnaturel, c'est de Dieu que le roi tire son autorité (c'est l'Eglise catholique qui a poussé le plus loin ce raisonnement, allant jusqu'à dire le Pape infaillible),
- la nuance fasciste : le leader entretient, grâce à son charisme, un lien direct avec le peuple qui rend inutile tout intermédiaire,
- la nuance poujadiste qui ne voit dans les élus que des corrompus, c'est le fameux tous pourris.
On remarquera que le Front National a, en définitive, relativement développé ces thèses. Seul le thème du tous pourris est revenu régulièrement dans les discours de ses dirigeants.
Dans les années 60, s'est développé aux Etats-Unis, un antiparlementarisme d'un genre nouveau, chez les économistes les plus libéraux, chez Milton Friedman et ches les théoriciens de l'école du Public Choice, notamment Tullock et Buchanan. La démocratie représentative, expliquaient-ils, donne aux citoyens de mettre des obstacles au libre jeu du marché. Il convient donc, disaient-ils, de modifier le système électoral et de généraliser les majorités qualifiées (à 60, 70%) qui rendent beaucoup plus improbables ces dérives. Pour Milton Friedman, le meilleur système était celui de Hong-Kong d'avant le retour de la Chine communiste, qui garantissait les libertés économiques mais limitait les libertés politiques.
Ces thèses très académiques ne sont pas imposées dans le débat politique, mais elles ont nourri les réflexions de tous ceux qui ont analysé les succès économiques de la Chine après la chute du mur Berlin et les difficultés de la Russie qui avait choisi, sous l'impulsion de Gorbatchev et Elstine, de construire une société démocratique. On retrouve leur inspiration chez certains de ceux qui réfléchissent aujourd'hui aux institutions européennes.
L'antiparlementarisme de Badiou est d'une toute autre nature, puisqu'il s'inscrit dans la suite de "blanc bonnet - bonnet blanc" de Jacques Duclos aux élections présidentielles de 1969. On se souvient que le dirigeant communiste avait alors appelé à s'abstenir expliquant (avec, d'ailleurs, d'excellents motifs) qu'il n'y avait pas de différence entre Poher et Pompidou. Pour Badiou, il n'y en a pas non plus entre Sarkozy et Royal, non qu'ils aient proposé les mêmes politiques, mais, plus simplement, parce que le régime parlementaire est le fourrier du capitalisme.
Il l'est en ce qu'il est profondément corruption du politique. Non que les politiques s'en mettent tous plein les poches, mais le régime parlementaire est asservissement de la puissance gouvernementale au cours des affaires. Nous tenons, collectivement, que "l'enrichissement, collectif ou privé, est le but naturel des actions politiques." (p.121) Dit autrement, la démocratie est corrompue parce qu'elle crée les conditions du développement capitaliste, soit exactement le symétrique de l'argument de Milton Friedman et des théoriciens de l'école du Public Choice.
Alain Badiou ne développe pas beaucoup plus. Pour le communiste qu'il est et continue d'être malgré l'échec et les crimes (qu'il passe à peu près sous silence) des régimes socialistes, l'important est d'établir ce lien entre démocratie parlementaire et capitalisme. Mais on peut essayer d'aller plus loin et se demander, poursuivant dans sa ligne de pensée, comment la démocratie parlementaire peut contribuer au développement du capitalisme.
On se souvient qu'Amartya Sen a montré qu'elle informait les politiques des besoins de la population, qu'elle les rendait sensibles à ceux-ci et les forçait à orienter les dépenses publiques dans la bonne direction. On pourrait ajouter qu'elle conduit à la mise en place des règles qui :
- égalisent les conditions de la concurrence ou, du moins, limitent les écarts entre opérateurs et facilitent donc le libre jeu de la concurrence : une durée du travail, un salaire minimum, l'obligation de payer les mêmes cotisations… mettent sur le même plan des entrepreneurs qui ont des situations de départ très différentes,
- redistribuent vers le plus grand nombre une partie des richesses produites par le capitalisme, grâce à différents mécanismes qui vont du salaire minimum aux différentes aides apportées aux plus démunis, évitant ainsi une concentration qui freinerait son développement,
- font circuler les richesses produites entre les générations, grâce, notamment, aux droits de succession, ce qui favorise l'émergence de nouvelles entreprises, de nouvelles idées et le développement de la concurrence.
Toutes règles qui sont demandées par les citoyens et obtenues de haute lutte dans le combat politique, mais qui favorisent le développement économique. A l'inverse de ce que l'on dit du coté des libéraux, le capitalisme a besoin pour se développer de ces règles que lui impose la démocratie parlementaire. C'est en ce sens que l'on peut reprendre et retourner l'argument de Badiou. Oui, la démocratie parlementaire a partie liée avec le capitalisme, mais bien loin d'être un motif de la critiquer, ce devrait en être un de la défendre puisque cela correspond au souhait d'enrichissement individuel et collectif des citoyens.
lundi, janvier 07, 2008
It's a free world de Ken Loach
On connaît l'histoire : une jeune femme, mère célibataire de milieu populaire qui a accumulé les emplois précaires décide, après s'être fait licencier par un patron à la main baladeuse, de créer sa propre agence de placement de travailleurs immigrés. Elle est efficace, énergique et… impitoyable. Le film nous décrit les conditions de vie effrayantes des immigrés, surtout des sans-papiers (travailleurs qu'un patron indélicat refuse de payer, vie dans des caravanes, queues chaque matin devant le bureau de placement pour trouver un emploi à la journée, voire dit à un moment Angie, l'héroïne de Loach, à l'heure) au temps de l'ouverture de l'Europe à l'Est (ces immigrés sont presque tous européens). Il nous montre comment les plus pauvres sont exploités par presque aussi pauvres qu'eux.
Le malaise vient de ce que l'on hésite sur les conclusions à tirer de ce récit. Faut-il fermer les frontières, interdire l'accès des étrangers (même européens) à nos marchés du travail? A un moment, Angie dit à son père que ses pratiques horrifient : "tu n'as qu'à entrer au Front National". Et c'est là, au fond, la leçon que l'on peut tirer de ce film, leçon que ne nous donne pas Loach, mais que le spectateur peut tirer de l'analyse de son malaise : si l'on veut satisfaire les revendications d'une partie de la classe ouvrière, il faut fermer les frontières, limiter voire interdire la circulation des personnes au sein de l'Europe, mais cela ne peut se faire qu'au dépens d'autres moins deux autres catégories de travailleurs : les immigrés qui n'ont pas de travail chez eux, et les travailleurs qui vivent dans les entreprises qui profitent de la globalisation.
Ce film illustre cette explosion des classes populaires que je décrivais dans une note précédente et qui est, je crois, au coeur des défaites successives des gauches européennes qui, incapables de construire un programme qui unisse toutes les composantes des classes populaires, les laisse donc naviguer entre l'extrême-droite (qui a ce programme protectionniste et anti-immigré), l'extrême-gauche anti-européenne et la gauche traditionnelle.
Comme souvent chez Loach, ce film est plus militant que sociologique. Je doute que beaucoup de patrons se satisfont de travailleurs recrutés à la journée, qu'il faut former, équiper, guider chaque matin. S'ils existent, ils sont une infirme minorité plus à chercher du coté des entreprises maffieuses que du coté des entreprises classiques. Mais peu importe, ce film met l'accent sur un point qui fait souffrir et dont la gauche ne se sortira qu'en abordant cette question de front.
dimanche, janvier 06, 2008
Changement climatique, Paris, ville sous l'Equateur?
Pour ceux que cela intéresse, on peut trouver leur article sur le site du Journal of Organic Chemistry.
vendredi, janvier 04, 2008
Evaluer les ministres?
Evaluer les politiques est une excellente chose qui devrait être développée. Evaluer les fonctionnaires au regard des objectifs qu'ils ont négocié avec leur hiérarchie serait également une excellente chose. Je le dis d'autant plus volontiers que je l'ai répété plusieurs années durant dans des séminaires que je donnais à Sciences-Po et dont trouvera ici le texte qui me servait à l'animer. Mais évaluer les ministres est une toute autre affaire. On devine bien l'inspiration : traiter les ministres comme les cadres dirigeants d'une grande entreprise. Mais je vois au projet tel qu'il nous est présenté dans cet article du Monde au moins trois obstacles.
Les ministres ne sont pas, d'abord, les patrons de leur administration comme peut l'être le directeur d'un service dans une grande entreprise. Ils n'ont pas les mêmes moyens de se faire obéir et de faire appliquer leur politique. Tout simplement parce qu'ils ne connaissent pas, le plus souvent, une administration qu'ils découvrent lorsqu'ils sont nommés et qu'ils risquent de quitter très rapidement. A l'inverse d'un cadre supérieur, ils n'ont pas le temps d'investir dans la connaissance de leurs équipes. Ils l'ont d'autant moins que leur principal champ d'activité est ailleurs, sur le plan politique, au Parlement, dans les campagnes électorales pour les prochaines municipales… Leur temps, celui de la politique, n'est pas celui de l'administration. Ils ne font pas que passer, ils peuvent à tout moment être révoqués, ils sont sur un siège éjectable, elle dure. La création de cabinets ministériels toujours plus importants auprès des ministres est la meilleure preuve de cette incompatibilité des temps politique et administratif.
Les critères choisis semblent, ensuite, l'avoir été de manière arbitraire en fonction des objectifs politiques du moment pour frapper l'opinion, mais on ne voit pas bien comment ils pourraient servir à évaluer les ministres. Est-ce Brice Hortefeux qu'il faut juger sur le nombre de reconduites à la frontière ou cette politique du nombre que l'administration n'arrive pas à conduire ? Comment peut-on évaluer Xavier Darcos sur le nombre d'heures supplémentaires réalisées par les enseignants alors même que l'on n'a aucune expérience en la matière? que l'on ne sait pas comment vont réagir les enseignants? que l'on ne sait même pas de combien d'heures supplémentaires on a effectivement besoin? Les plus ridicules sont, sans doute, les critères retenus pour l'évaluation du ministre de la culture : "l'évolution de la fréquentation des musées lorsqu'ils sont gratuits", "la part de marché des films français en France", ou "l'évolution du piratage des fichiers audio et vidéo". Quel moyen son administration ou elle-même ont-elles d'agir sur ces indicateurs? Les politiques menées dans chacun de ces domaines peuvent-être bonnes ou mauvaises, donner des résultats ou ne pas en donner, mais est-ce la ministre qui les définit? N'est-ce pas plutôt le Président et le gouvernement qui les accepte ou refuse?
L'appel à une société de conseil pose, enfin, plusieurs types de problèmes :
- il existe dans l'administration des institutions (Cour des Comptes, inspections des Ministères, CAE…) qui avaient tout autant légitimité qu'un cabinet privé de culture américaine (son fondateur Dominique Mars vient du BCG) pour mener ce type de mission et qui auraient certainement su mieux résister aux demandes politiques qu'un fournisseur extérieur,
- les cabinets privés connaissent mal les mondes de la fonction publique et de la politique et risquent de commettre des erreurs d'appréciation liés à cette méconnaissance,
- on ne sait pas si ce cabinet a la moindre référence dans ce domaine, si ces méthodes ont été testées.
Tout cela fait du bruit, mais je ne suis pas sûr que ce soit très sérieux.