mercredi, février 16, 2011

Jacob, DSK et Copé

La gauche a comparé les propos de Christian Jacob sur DSK à ceux de Vallat sur Blum. Rappelons les : "DSK, ce n'est pas l'image de la France, l'image de la France rurale, l'image de la France des terroirs et des territoires, celle qu'on aime bien, celle à laquelle je suis attaché."

En a-t-elle trop fait? Je ne crois pas même si l'on peut penser que Christian Jacob ne tentait pas, comme Le Pen lorsqu'il lui arrivait de prononcer ce type de phrase, d'envoyer un signal à ce qu'il peut y avoir d'antisémites en France. Ce type de propos mérite d'être rapidement taclé.

François Fillon a pris la défense de Jacob, mais je ne crois qu'on ait entendu Jean-François Coppé lui dont Wikipedia nous apprend qu'il est "le fils de Monique Ghanassia, originaire d'Algérie, et du professeur Roland Copé, chirurgien gastro-entérologue proctologue d'origine roumaine. Du côté paternel, son grand-père Marcu Hirs Copelovici, fils de Copel et Zleta, originaires de Bessarabie, est un médecin né à Iaşi dans l'est de la Roumanie au début du siècle. Fuyant l'antisémitisme de son pays, il émigre à Paris en 1926. Devenu Marcel Copé, il se marie peu après avec Gisèle Lazerovici, fille de Ghidale Lazerovici, comptable, et Anna Stern. Du côté maternel, son grand-père Ismaël André Ghanassia, fils de Moïse Ghanassia et Djouhar Soussi, originaires de Miliana, est avocat à Alger. Son épouse, Lise Boukhabza, est la petite fille d'un rabbin originaire de Tunisie, et d'une mère originaire de Tétouan au Maroc. André Ghanassia, son épouse et leurs trois enfants, dont Monique, quittent Alger pour la métropole dans les années 1950, peu après les débuts de la guerre d'Algérie." Ce qui n'en fait certainement pas un modèle de cette "France des terroirs et des territoires "dont nous parle Jacob et dont on se demande bien où il est allé la chercher sinon dans quelque rêverie maurrassienne. On aimerait savoir ce qu'en pense in imo pectore le secrétaire général de l'UMP. Ce doit être quelquefois pénible de diriger un parti de droite…

PS On ne rencontre pas souvent ce détour par ses origines familiales dans les biographies d'hommes politiques sur Wikipedia. Je ne suis pas sûr que cela nous éclaire sur la personnalité de Coppé. Qui l'a écrit et pourquoi? Peut-être un de ces amis de Christian Jacob qui s'intéressent aux liens que les hommes politiques entretiennent avec le terroir?

lundi, février 14, 2011

L'Egypte, nos réticences, Rawls, Habermas

Daniel Schneiderman souligne, après Pascal Boniface, les étranges réserves de nos élites devant les révolutions tunisienne et égyptienne dans un papier qu'il titre excellement : Les «cache ta joie» de la révolution égyptienne dans lequel il s'en prend à Yves Calvi qui à force d'être partout  la fois finit par faire commerce de fantasmes plus que de journalisme.

Ici même, j'ai il y a deux ou trois jours souligné le rôle dans ces réserves de l'inquiétude pour Israël chez les intellectuels les plus attachés à sa défense (La révolution égyptienne, Israel et nos intellectuels). Il me semble que l'on peut avancer une autre raison à l'inquiétude que suscite naturellement tout changement dans une région turbulente : notre rapport à la démocratie.

Des Tunisiens et des Egyptiens ont pris des risques insensés, plusieurs dizaines, plusieurs centaines, on saura sans doute bientôt combien, sont morts pour la liberté. Et on a vu à la télévision de nombreux Tunisiens et Egyptiens nous dire qu'ils étaient prêts à aller jusque là pour faire tomber les dictateurs. Ils avaient, ils ont une conception héroïque de la démocratie. Se battre pour la démocratie, c'est pour eux se battre pour des biens, la liberté de s'exprimer, pour la fin des privilèges d'une petite caste. Pour parler comme les philosophes, ils ont une conception substantielle de la démocratie. Nous en avons une conception procédurale.

Pour nous, mais aussi pour les philosophes qui en font aujourd'hui la théorie, la démocratie est une procédure. Nous ne cherchons plus, depuis belle lurette à la gagner à coups de béliers contre des dictatures, nous voulons seulement lui trouver une justification formelle, indiscutable parce que formelle : c'est la procédure, ce que Rawls appelle le voile d'ignorance et Habermas la délibération, qui, à nos yeux, justifie aujourd'hui la démocratie. C'est parce que la procédure est neutre, que les résultats qu'on en tire sont justes.

Il n'y a évidemment pas de place dans cette approche pour la révolution, pour les foules qui descendent dans la rue et affrontent des forces de police qui n'hésitent pas à tirer à balles réelles.

Si nos élites sont si réservées, c'est peut-être qu'elles ont perdu cette vision héroïque, substantielle de la démocratie. Les révolutions tunisiennes et égyptiennes, celles qui se préparent en Algérie, au Yemen et peut-être ailleurs nous le rappellent : la démocratie, la liberté, cela peut aussi faire rêver et l'on peut mourir pour.

samedi, février 12, 2011

La révolution égyptienne, Israël et nos intellectuels

La révolution égyptienne a suscité d'étranges réticences chez plusieurs de nos intellectuels en vue dans les médias, chez Alexandre Adler, Bernard-Henri Levy, Alain Finkelkraut, réticences qui expliquent sans doute pour partie la manière gênée dont nous avons accueilli des événements qui devraient nous réjouir. Deux arguments sont avancés : la crainte des frères musulmans et le manque d'expérience démocratique du monde musulman. Le premier est mal fondé et le second tout simplement insultant, mais le plus surprenant est que ces réticences viennent d'intellectuels d'ordinaire attachés aux droits de l'homme et prompts à condamner leurs violations ailleurs. Pascal Boniface a une explication : cette révolution "pourrait signifier la mise en place de régimes moins accommodants avec Israël. Or c’est leur principale pour ne pas dire unique préoccupation." Il a sans doute raison. Il ne le dit pas, mais il pourrait ajouter que plusieurs de ces intellectuels sont juifs, ce qui renvoie aux relations complexes qu'Israel et la diaspora juive entretiennent.

Israël est pour les juifs, où qu'ils se trouvent dans le monde, la garantie que jamais cela ne se reproduira pas : cela, c'est la shoah, bien sûr, mais ce sont aussi les pogroms et ces siècles de discrimination, de ségrégation et d'exactions dont ont souffert les juifs un peu partout en Europe. Mais Israël a également besoin des juifs de la diaspora : que serait-il si partout en Occident des communautés juives importantes ne prenaient sa défense lorsqu'il est attaqué? L'attention des Etats-Unis, celle de l'Europe ne seraient certainement pas ce qu'elle est si ne se trouvaient dans tous ces pays des communautés juives actives. Quoique puissent dire les sionistes, le sort d'Israël et celui de la diaspora sont intimement liés.

Toute la question est de savoir qui influence qui? Est-ce que ce sont les juifs d'occident qui incitent Israël à la modération dans ses relations avec ses voisins?  qui l'encouragent à chercher la paix? ou est-ce à l'inverse, Israël qui fait oublier aux juifs d'occident leur goût de la liberté et de la démocratie? On aimerait que la première proposition soit la bonne, que Finkelkraut, BHL et tous ceux qui sont en Occident les meilleurs avocats d'Israël sachent convaincre ses dirigeants de faire preuve de modération. Il leur serait assez facile de dire que défendre l'existence d'Israël est une chose, que chasser les Palestiniens de chez eux en est une autre. Mais il semble, malheureusement, que la dernière proposition soit la bonne. La politique nationaliste de l'extrême droite israélienne déteint sur eux et les amène à prendre des positions pour le moins… "insolites" : comment peut-on, quand on vit dans une démocratie et qu'on en sait le prix, craindre les aspirations d'une population à plus de liberté?

Les menaces dont Israël est victime de la part de ses voisins les aveuglent sur ses faiblesses. Plus celles-ci sont grandes, plus Israël est critiqué par la gauche, par la communauté internationale, plus ils se sentent dans l'obligation de le défendre, et plus ils ont, naturellement, le sentiment d'être isolés, incompris. Mais à force de défendre des positions nationalistes de l'extrême-droite israélienne au pouvoir, à force de s'inquiéter du risque islamiste, ils en viennent à le surestimer et à défendre l'indéfendable. Ils en sont en quelque sorte otages de l'extrême-droite au pouvoir en Israël quand on aimerait qu'ils combattent, son influence pour le plus grand bien d'Israël. Car s'il est nécessaire qu'Israël survive, ce n'est pas en empiétant chaque jour un peu plus sur le territoire des Palestiniens qu'il renforce ses chances de signer la paix avec ses voisins.


jeudi, février 10, 2011

Diables de journalistes…

La presse ne parle ce matin que de la petite phrase d'Anne Sinclair. L'épouse de Dominique Strauss-Kahn a donc déclaré au Point qu'elle ne se souhaitait pas que son mari postule pour un second mandat au FMI. Et voilà : les journalistes jubilent. L'information est sortie le jour où Martine Aubry fait un discours, qu'elle veut important, à Dakar comme pour brouiller son message, le rendre inaudible. Y a-t-il des tensions entre les deux candidats non déclarés à la candidature du PS? DSK va-t-il vraiment revenir? Il ne peut pas le dire, mais il lance des signaux…

Ce sont les mêmes journalistes qui remplissent feuillets après feuillets sur ce non-événement qui se plaignent de la médiocrité du débat politique. Se sont-ils jamais demandés quelle pouvait être en la matière leur part de responsabilité? Après tout, si l'on ne parle ce matin que de cela, c'est bien de leur fait.

S'ils voulaient vraiment que le débat politique soit d'un autre niveau, ils inviteraient les politiques à parler d'autre chose. De fiscalité, par exemple, un sujet qui semble passionner les Français depuis que Thomas Piketty et ses co-auteurs ont publié leurs propositions fiscales. Ce ne devrait pas être difficile. Il y a à gauche au moins un politique qui connait bien ces questions, François Hollande qui en a débattu longuement sur Mediapart avec Thomas Piketty. Et on sait qu'à droite Jean-François Coppé, qui a été ministre du budget et qui connait bien, lui aussi, ces questions, a relancé le projet de TVA social. Il y aurait là matière à des échanges musclés, techniques mais aux dimensions politiques évidentes qu'une radio, une télévision, un journal seraient bien inspirés d'organiser. Ce serait certainement plus intéressant que les micro-stratégies de communication des candidats pas vraiment candidats du PS.

mercredi, février 09, 2011

Mais pourquoi ne prennent-ils donc pas leurs vacances en France?

Nicolas Sarkozy à Marrakech, invité par le roi du Maroc, François Fillon en Egypte invité par Moubarak, Alliot-Marie en Tunisie par un protégé de Ben Ali… Cela fait beaucoup. Beaucoup trop. Et au delà de ce qu'il y a de choquant à voir nos dirigeants prendre leurs vacances aux frais de dictateurs, trop heureux de les recevoir, je m'interroge sur le principe même de ces vacances systématiques à l'étranger. Je comprends bien l'intérêt des pyramides, du désert  ou de Marrakech, je suis le premier à aimer tout cela, mais des hommes politiques en charge des affaires de l'Etat, dans une situation économique difficile, avec une opinion divisée, qui ne comprend pas toujours leurs décisions (et c'est un euphémisme) ne gagneraient-ils pas à passer leurs vacances en France? Cela leur donnerait l'occasion de rencontrer d'autres Français que leurs collaborateurs, obligés et amis politiques. Et ce serait certainement une bonne chose qu'ils puissent, ne serait-ce qu'une fois ou deux, au détour d'une rencontre dans un restaurant, sur un marché ou une plage, dans l'atmosphère détendue des vacances, entendre une opinion dont les sondages ne donnent qu'une vision abstraite.

Imaginons qu'à l'occasion d'une promenade en montagne, Nicolas Sarkozy ait fait quelques centaines de mètres sur un sentier caillouteux avec un magistrat, n'importe quel magistrat. De quoi auraient-ils parlé? Du temps, du paysage, mais aussi de justice. Et cela aurait sans doute évité à notre Président une de ces sorties populistes qui mettent aujourd'hui toute la magistrature dans la rue. Les politiques plus que quiconque ont besoin de remettre de temps à autre les pieds sur terre. Alors qu'ils nous donnent, en prenant ainsi toutes leurs vacances à l'étranger, le sentiment de fuir, de fuir les Français au nom desquelles ils prennent des décisions.

Ils devraient, pour ce seul motif, s'imposer de prendre quand ils sont aux responsabilités, leurs vacances en France. Ce n'est pas beaucoup leur demander. Après tout, personne n'a jamais été condamné à rester ministre ou Président à vie. Il leur sera toujours temps, une fois quitté le gouvernement, de visiter de fond en comble le Maroc, la Tunisie ou l'Egypte.

mardi, février 08, 2011

Tunisie : faute de l'ambassadeur ou défaut d'expertise?


Nicolas Sarkozy a donc choisi de licencier (pardon, remplacer) Pierre Ménat, l'ambassadeur de France en Tunisie, au motif qu'il aurait mal informé l'Elysée de la situation en Tunisie (il me semble avoir lu quelque part qu'il en avait plus appris sur la situation en Tunisie en bavardant avec la jeune épouse d'Eric Besson, d'origine tunisienne, qu'en lisant les dépêches du Quai d'Orsay).

Que l'Elysée ait été mal informé, c'est une évidence. Que sanctionner l'ambassadeur soit la solution ne l'est pas forcément.

Il est possible qu'il y ait eu erreur d'appréciation de l'Ambassade. Auquel cas, la sanction se justifie. Mais il peut aussi y avoir un défaut d'expertise, ce qui est tout autre chose. Il semble que l'Ambassade ait basé ses analyses sur le satisfecit que les économistes des organisations internationales donnaient au régime en place (ouverture à la mondialisation, appel aux investissements étrangers, croissance saine) et sur ses contacts au sein d'un pouvoir aveuglé par une politique de répression qui interdit évidemment d'entendre les revendications populaires. Si c'est bien le cas, c'est moins l'ambassadeur qui est en cause que le mode d'expertise retenu pour analyser la situation : économistes internationaux et contacts avec le pouvoir ne disent pas tout. Bien au contraire, ils ont été en cette affaire aveugles à ce que géographes et démographes voyaient depuis un certain temps comme le suggèrent les travaux du CIST ou ceux de l'INED (je pense notamment à ce ceux de Kamel Kateb sur la famille au Maghreb).

Et cet aveuglement est moins affaire d'individus que d'approche conceptuelle : beaucoup d'économistes exclusivement enfermés dans leurs modèles théoriques ne paraissent pas avoir compris que la croissance économique associée au développement des inégalités conduit presque inévitablement à l'instabilité politique et sociale. Dans une démocratie, ces turbulences entraînent un changement de majorité et de politique. Dans une dictature cela conduit à la révolte et donc à la répression qui lorsqu'elle réussit n'aide pas à comprendre les attentes de la population et mène à la révolution lorsqu'elle échoue.

Si c'est, comme je le crains, le mode d'expertise qui est en cause, l'Elysée risque de se retrouver mal informé apr bien d'autres ambassadeurs dans bien d'autres pays.

Sur la situation tunisienne, les travaux du CIST et ceux de Kamel Kateb, on peut voir cette chronique : Tunisie, une jeunesse se révolte

lundi, février 07, 2011

Pitoyable Alliot-Marie

Je ne partage pas, tant s'en faut, les vues de Thierry Desjardins, même si je comprends certaines de ses colères, mais il touche ce matin dans son blog étrangement juste, il met le doigt sur un quelque chose de presque impalpable mais de tellement juste, ce qu'il appelle, dans un de ces jeux de mots que le polémiste qu'il est affectionne, la "sale gueule" de nos dirigeants.

De Michelle Alliot-Marie, pitoyable amie d'un obligé de Ben Ali, il écrit : "Avec sa fausse assurance, sa morgue méprisante, son petit coté pincé, elle était souverainement antipathique et on comprenait soudain, grâce à elle, l’une des failles du régime. Nos dirigeants actuels ne sont pas souriants, pas chaleureux, ils n’ont rien d’« humain » et tous, en effet, plutôt « une sale gueule »." (…) C’est quoi avoir « une sale gueule » ? C’est afficher, ostensiblement, jusque dans ses moindres rictus, la certitude qu’on est au pouvoir parce qu’on est le meilleur et donc qu’on a droit à ce pouvoir et c’est afficher, en même temps, le mépris total qu’on éprouve pour les autres, tous les autres, à commencer par « la populace », les journalistes, l’opposition, les élites, les moralistes qui se permettent des commentaires désobligeants." C'est cela, c'est exactement cela. C'est ce qui avait déjà entraîné la chute de Juppé, "cassant, hautain, méprisant, sûr de lui jusqu’au ridicule"(Desjardins à propos de Sarkozy mais cette description vaut également pour l'ancien premier ministre) qui valait pourtant infiniment mieux.

Il y a quelques mois Stéphane Guillon s'était attiré les pires ennuis en mettant en évidence combien Eric Besson avait un physique de traitre. On avait envie de lui dire : "Tu as tort de parler de son allure, ce n'est pas fair." Mais d'ajouter aussitôt, au moins in petto : "C'est vrai que le corps parle." C'est vrai que le sien parlait et qu'ils ont souvent nos ministres vilaine mine. Comme s'ils n'étaient pas vraiment heureux de ce qu'ils font.

PS Pitoyable Alliot-Marie? Peut-on autrement qualifier ses déclarations sur ses prochaines vacances? "Maintenant je vais être très attentive, je ne sais pas où j'irai passer mes vacances, je pense que je ne quitterai pas la Dordogne si ça continue comme ça." Qu'en pense-t-on du coté de Sarlat? et du ministère du tourisme…

jeudi, février 03, 2011

Eva Joly, la Tunisie et 1789

Dans un excellent et passionnant commentaire sur la situation égyptienne, Arthur Goldhammer soulignait hier le rôle de la mémoire dans l'interprétation des événements. Dans l'interview qu'elle vient de donner à Mediapart sur les révolutions tunisienne et égyptienne, Eva Joly apporte de l'eau à son moulin qui déclare : "La situation est incertaine et inquiétante, il n'y a rien de garanti, mais l'espoir est là. On revit l'Europe en 1989. C'est un empire qui s'effondre..." Mes interlocuteurs avaient l'impression de revivre mai 1968. Elle revit 1789. Sans doute était-elle en Norvège en 1968… Reste que sa comparaison avec 1789 est probablement plus pertinente.

Michelle Alliot-Marie ne démissionnera pas?

Michelle Alliot-Marie se débat comme un beau diable pour sortir de la nasse dans laquelle ses déclarations insensées sur l'aide policière que la France pourrait apporter au gouvernement Ben Ali l'a mise. Les révélations sur ses relations avec un cacique du régime et un milliardaire ne sont, bien sûr, qu'un détail. Sans doute a-t-elle payé le reste de son voyage et est-elle de bonne foi lorsqu'elle assure avoir profité de cet avion comme d'autres de la voiture d'un ami. Mais se rend-elle compte de l'effet délétère que cette seule information peut avoir sur l'opinion? Combien de Français ont eu l'occasion de monter dans un avion privé? combien ont rencontré un homme qui possède un? Et comment croire une seconde que cette proximité avec les gens qui ont, quoi qu'ils disent, profité du régime, n'a pas eu un impact sur son évaluation de celui-ci?

Ne serait-ce que pour cela elle aurait dû démissionner, mais nous ne sommes pas en Grande-Bretagne…

Après l'épisode Bettencourt, les amitiés de Nicolas Sarkozy avec tout ce que la société française compte d'héritiers de hau vol (Bouygues, Lagardère…) voici une nouvelle illustration de la collusion des gens au pouvoir et des plus riches. C'est du Besancenot dans le texte. 

mercredi, février 02, 2011

Une envie de Révolution?

Je ne m'autoriserai pas à dire quoi que ce soit de ce qui se passe en Egypte et en Tunisie tant mon ignorance des mouvements sociaux dans ces deux pays est abyssale mais je reste tout de même frappé par leur réception chez nous. Nous sommes heureux, et c'est bien naturel, de ces batailles pour la démocratie, nous sommes également contents, malgré les inquiétudes affichées par tant et tant d'observateurs auto-proclamés experts du monde arabe, de voir d'autres voix que celles de l'Islam radical s'exprimer dans ces pays, mais il y a plus que cela, il y a ce que j'appellerai le plaisir de la révolution. Une révolution qui ne nous coûte pas grand chose bien sûr, cela se passe si loin, mais qui nous met de bonne humeur. Est-ce que nous rêverions, comme le suggère Mélenchon, de descendre dans la rue? est-ce que nous aimerions nous aussi faire la révolution?

J'étais hier avec quelques amis qui n'ont pas tous connu mai 1968 et qui me disaient : "Enfin le retour des années 60, ce goût de la liberté, de l'audace. On en a fini, grâce aux Tunisiens et aux Egyptiens avec ces années, que dis-je ces décennies des langues de bois!"

Ils ont pris du ventre et pensent, pour certains à leur retraite et à leurs petits-enfants, mais ils en ont envie de la révolution, d'une révolution douce faite par d'autres qui prennent les risques, bien sûr… mais révolution tout de même.

Je me demande et j'aimerais qu'Arthur Goldhammer, ce si fin observateur des opinions des deux rives de l'Atlantique, nous le dise : est-ce vraiment fantaisie française ou rencontre ailleurs, chez lui aussi, cette espèce de parfum de liberté que nous apporte la jeunesse arabe?