J'ai donné, il y a quelques jours, à Contre feux, un "journal" sur le net, un article sur l'immigration qui reprend des thèses que j'ai développées ailleurs dans un livre et dans des émissions de radio.
Cet article a suscité plusieurs réactions qui éclairent bien, je crois, la manière dont nous lisons et traitons les informations que nous trouvons sur le net :
- la plupart de ces commentateurs ne réagissent pas aux arguments développés dans l'article. Ils pourraient les critiquer, les développer, les enrichir… Ce n'est pas le cas : chacun raconte son histoire, chacun a son opinion qu'il développe ;
- les différents commentateurs dialoguent beaucoup plus entre eux qu'avec l'auteur de l'article ;
- les arguments rationnels ou chiffrés sont rares alors même que l'information est largement disponible sur le web : encore faut-il faire l'effort d'aller la chercher. Sur ce sujet, plus que sur d'autres peut-être, les légendes urbaines (ici, une histoire de concierge portugaise mieux traitée par la Sécurité sociale qu'une française de souche) les remplacent.
Est-ce un effet du web? et des modes de lecture qu'on y développe? J'en doute. Il me semble plutôt que le web révèle que l'on retient le plus souvent très peu de choses de la lecture d'un article, de l'écoute d'une émission ou d'une conférence. Nous sommes inondés d'informations mais celles-ci restent, pour l'essentiel, en surface. Dans le fond nos opinions, d'où qu'elles viennent, résistent à tout ce qui pourrait nous en faire changer. Nous savions déjà que nous lisons de préférence les journaux qui défendent des opinions proches des nôtres. Cette petite expérience fait penser que lorsque nous lisons un article qui va à l'encontre de ce que nous pensons, nous n'entendons pas forcément ce qu'il dit. Cela ne veut évidemment pas dire que nous ne changeons jamais d'avis, mais c'est manifestement un processus long et complexe.
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