Médiapart publie un témoignage accablant de Claire T. la comptable que Madame Bettencourt a licenciée en 2008 pour cause de "mauvais témoignage" dans le conflit qui l'oppose à sa fille. On y apprend que la milliardaire a financé à hauteur d'au moins 150 000€ la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy qui a, lui-même, reçu à plusieurs reprises des enveloppes de billets des Bettencourt. Elle ne peut évidemment pas apporter de preuves matérielles mais suffisamment d'indices pour que les policiers auxquels elle a fait ces déclarations puissent travailler et remonter la piste : intervention de Patrick de Maistre, nombreux voyages de celui-ci en Suisse, appel téléphonique à la responsable de l'agence BNP, une certaine Eva qu'il ne devrait pas être difficile de retrouver, pour vérifier qu'elle ne pouvait pas retirer plus des 50 000€ qui lui étaient autorisés, témoignages des autres domestiques qui entendaient tout à travers les portes tant les Bettencourt devenus durs d'oreille avec l'âge parlaient fort…
Plus surprenant, peut-être, on apprend de ce témoignage que le fisc qui ne manque jamais de sanctionner un contribuable qui dépose en retard sa déclaration sait faire preuve d'indulgence lorsqu'il s'agit du retard d'une contribuable comme Mme Bettencourt (alors même que les 10% auraient représentés 4 millions d'€). On apprend également que les Bettencourt n'ont pas fait l'objet d'un seul contrôle fiscal depuis 1995, au contraire de ce qu'on nous avait dit ("tous les gros contribuables sont contrôlés tous les trois ans".)
Ces révélations prouvent qu'Eric Woerth et tous ceux qui nous assuraient qu'il n'y avait pas eu de financement parallèle ont menti. Le parapluie Rocard ne tient plus.
Il reste, bien sûr, à vérifier ces informations ou, plutôt, à trouver des preuves. C'est le travail de la police. Mais il reste bien d'autres choses à comprendre :
- c'est sur instruction de Philippe Courroye, que l'on présentait comme un ami de Nicolas Sarkozy que les policiers ont interrogé une nouvelle fois Claire T. Que s'est-il passé entre les deux hommes? Le magistrat at-il choisi de quitter le navire ou n'est-ce que le sursaut d'honneur d'un homme qui n'en peut plus de se faire accuser de ne pas faire son métier correctement?
- comment imaginer une seconde que ce financement parallèle n'ait pas créé chez ceux qui en ont bénéficié une obligation d'indulgence à l'égard de la fraude fiscale? La lutte contre l'évasion fiscale était le cheval de bataille d'Eric Woerth. N'était-ce donc que poudre aux yeux?
- qu'attendait Patrick de Maistre du recrutement de Florence Woerth. L'a-t-il recrutée de son chef (ce que peuvent suggérer les enregistrements) ou l'a-t-il fait à la demande de son mari? ce qui modifierait le jugement que l'on peut porter sur le trésorier de l'UMP.
J'ajouterai, pour conclure, que rien de tout cela ne serait sorti si Nicolas Sarkozy avait eu le bon sens de changer de gouvernement il y a quelques semaines au début de cette affaire. La pression médiatique serait retombée. Le juge Courroie n'aurait pas envoyé ses policiers réinterroger la comptable qui serait restée silencieuse forte des 400 000€ de primes de licenciement qu'elle a reçus.
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