J'écoute France Inter tous les matins de 6h30 à 7 heures. Audrey Pulvar qui présente cette nouvelle grille n'est pas désagréable, ses interviews sont intéressantes, les sujets choisis pertinents, mais cette tranche a perdu du mordant du temps que l'occupait Nicolas Demorand. Affaire de voix, mais aussi de conception.
La nouvelle direction de la radio, celle qui a éliminé les humoristes trublions pour cause d'anti-sarkozysme, a choisi de demander à des éditorialistes de la presse écrite de donner chaque matin, à tour de rôle, une chronique. J'ai entendu celle du Point (à peu près inaudible pour cause de voix désespérément non radiophonique) et celui de Valeurs actuelles. Qu'en dire? L'idée n'est pas a priori mauvaise : qu'une radio de service public donne à des journaux de tendances différentes l'occasion de s'exprimer n'est pas étranger à sa mission. Mais… ai-je envie d'entendre chaque jeudi, à mon réveil, Valeurs Actuelles? La réponse est : non. J'ai certainement tort, mais je n'éprouve aucun plaisir à être au petit matin agacé par une opinion si différente de la mienne qu'il ne me viendrait pas à l'esprit d'acheter un journal qui flirte régulièrement avec les thèses du Front National (pour dire vrai, le journaliste qui est intervenu sur France Inter a tenu des propos mesurés, mais peu importe).
La radio est un média intime. L'auditeur entretient un lien particulier avec ceux qui parlent dans le poste, qu'il entend tous les jours à la même heure, dans les mêmes situations. Il ne les connait que par leur voix, son timbre, sa hauteur, le rythme de ses phrases. A l'inverse de la télévision qui endort quand elle n'émeut pas (d'où notre propension à zapper en permanence), la radio rapproche. Elle exige une certaine complicité entre l'auditeur et celui qui s'adresse à lui tous les matins. Je ne crois pas avoir envie de nouer la moindre complicité avec quelqu'un qui travaille à Valeurs actuelles.
Qu'on m'entende bien : je ne souhaite pas censurer Valeurs Actuelles (ni, d'ailleurs, aucun autre titre et j'avais été choqué lorsque la direction d'Inter avait licencié un journaliste qui citait un peu trop souvent dans sa revue de presse Présent, le journal du Front National), mais que ses opinions soient présentées dans une revue de presse suffirait à mon bonheur.
Si l'on s'en tient aux principes, ce bout de grille n'a donc rien de scandaleux mais c'est sans doute une erreur de marketing qui devrait se traduire, dans les mois qui viennent, par une érosion de l'audience d'une radio qui avait su exprimer les aspirations d'une certaine catégorie d'auditeurs (celle à laquelle j'appartiens) mieux que quiconque.
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