La vente du Rafale, succès si longtemps attendu de la technologie française, a fait pousser plus que des soupirs de satisfaction à Paris, mais peut-être faut-il lire la presse indienne pour avoir une vision plus objective de ce "contrat du siècle." The Hindu, le grand journal anglophone de l'Inde du Sud (il est publié à Chennaï) y consacre un long article qui tire ses informations du concurrent malheureux, EADS. On y apprend :
- que cet avion a 26 ans et qu'il n'est plus de la dernière jeunesse (son concurrent proposé par EADS serait plus moderne), ce que la presse française dit peu ;
- que cette vente qui avantage Dassault dont on sait les liens étroits avec l'Elysée a été poussée par Nicolas Sarkozy au point que Louis Gallois, alors Président d'EADS, avait demandé au journal de repousser la publication de l'interview qu'il lui avait accordé au lendemain du voyage de Nicolas Sarkozy en Inde. “We are both pushing competing products. It could complicate matters,” lui aurait-il dit ;
- que cette vente devrait sauver Dassault Aviation qui connaîtrait selon le journal de sérieuses difficultés financières ;
- que cette préférence indienne aurait, enfin, une dimension politique : la France a un siège au Conseil de Sécurité de l'ONU et cela aurait compté, l'Inde ayant des visées dans ce domaine. C'est, en tout cas, ce qu'a affirmé une source chez EADS au journal.
5 commentaires:
Si la presse indienne permet d'avoir un regard différent sur le contrat, et notamment les éléments annexes, les approximations ne sont pas pour autant absentes.
Dire que le l'avion a 26 ans est véritablement de la désinformation. C'est un démonstrateur qui a volé en 1986, permettant surtout de valider les concepts aérodynamiques. L'avion a été mis en service en 2001 (contre 2004 pour l'eurofighter) et a bien évolué depuis (il en est au standard F4 à présent, avec notamment un nouveau radar).
Il serait bon que parfois nous arrêtions de nous tirer une balle dans le pied en dénigrant notre propre savoir faire technologique.
Dont acte, mais je le précisais, la source du journaliste semble être chez EADS.
Reste que le contrat est loin d'être signé: les Indiens ont l'habitude de longues négociations dont les résultats sont rien moins qu'acquis. Le contrat au Brésil était donné pour acquis lui aussi. Comme vous le dites sur votre site, ces contrats éventuellement acquis politiquement contiennent des clauses de compensations diverses, contrairement aux contrats commerciaux normaux comme ceux de l'industrie allemande: compensations politiques jamais discutées démocratiquement comme celle évoquée ici (soutien pour l'entrée au conseil de sécurité comme membre permanent), compensations technologiques amenant le transfert des technologies les plus innovantes, comme ici celles du radar au std F4. Si nous nous tirons une balle dans le pied en l'occurrence c'est plutôt en vendant dans ces conditions pour sauver un ami du pouvoir. Il y a certes quelques centaines voire milliers d'emplois à court/ moyen terme qu'il faudrait redéployer (on a du mal en fait à prévoir ce que le contrat encore flou permettrait de sauver en terme qualitatif) mais ça fait un moment qu'ils sont maintenus à bout de bras sans préparer le futur par le budget de la Défense. Quid après le Rafale? Saura-t-on un jour faire des drones par exemple?
Pensez vous sérieusement que l'Inde a décidé d'acheter 126 avions de combat pour 20 milliards de $ pour faire plaisir à Nicolas Sarkozy ?! New-Delhi a choisi le Rafale au terme d'une compétition dans laquelle les avions de combats américains, russes et européens étaient en lice. Il a été choisi sur ses qualités et son prix. La presse française dit d'ailleurs peu de choses sur le fait que l'Eurofighter, concurrent malheureux fabriqué par EADS est quasi deux fois plus cher selon les Cours des Comptes anglaises et françaises. Enfin, avec une trésorerie de plus 3 milliards d'€ Dassault qui réalise 75% de son chiffre d'affaires avec les Falcon civils est loin de la faillite !
Thank you for sharing this post.
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